Var-Matin (Grand Toulon)

« Ici, tout est réuni »

Pierre-Ambroise Bosse, champion du monde du 800 m retrouve Monaco ce soir où il avait établi le record de France en 2014. Un bon test avant les Championna­ts d’Europe le 7 août

- RECUEILLI PAR FABIEN PIGALLE

Pierre-Ambroise Bosse, spécialist­e du  m, se fait une joie de retrouver le Meeting Herculis. A quelques semaines des Championna­ts d’Europe de Berlin, le champion du monde nantais va se frotter à la référence mondiale Nijel Amos du Botswana. Sans pression, mais avec cette envie de vaincre qui le caractéris­e. Après avoir hésité entre une poêlée de gnocchis aux fèves et la pêche du jour, Bosse s’est mis à table en claquettes. L’occasion pour nous de le cuisiner…

Vous vous êtes présenté en claquettes en conférence de presse... C’est parce que vous vous sentez bien à Monaco ? Non en fait, à peine arrivé, on m’a sauté dessus pour un contrôle antidopage. Je les comprends remarque... Ma mère m’a envoyé une photo de moi petit ce matin, et à leur place, je me contrôlera­is aussi... (rires). C’est suspect. Franchemen­t, avec cette tronche, tu dis que le môme il est dopé (rires), que ce mec-là va souffrir toute sa vie ! Je plaisante mais en vrai, je n’ai tout simplement pas eu le temps de me changer. Je suis arrivé à l’aéroport à  h, il faisait  degrés. Je respecte mon sponsor, j’ai mis un tee-shirt Puma, mais c’est tout. Les claquettes, ce n’est pas du tout pour faire le mec “cool attitude”, ça ne m’intéresse pas... Et puis franchemen­t, t’as vu la tronche de mes pieds ? Ils sont atroces.

Vous aviez établi le record de France du  m en . Dans quel état d’esprit êtes-vous ? Monaco m’a souvent réussi. Même l’an dernier, quand je n’étais pas en forme, j’étais venu chercher les minima pour les Championna­ts du monde.

A Monaco, les athlètes donnent-ils plus qu’ailleurs ? Je ne sais pas s’ils donnent plus, mais ici, tout est réuni. C’est une date où l’on est tous en forme la plupart du temps. Ici, toutes les conditions sont réunies. Il n’y a pas de vent, il fait chaud, on court en soirée, le public apporte un plus quand on est Français. Surtout pour le demi-fond. Nous, on a besoin de zéro vent contrairem­ent aux sprinters. Et il y a qu’ici qu’on trouve ça. On ne se transcende pas parce que c’est Monaco. C’est Monaco qui permet d’être bon. Parce que si on ne commence pas à être en forme en juillet... c’est qu’on est en train de louper le coche. Qu’attendez-vous de cette course ? Je n’ai même pas regardé la start list pour être franc. On ne sait jamais ce qu’il peut se passer. Mais dans tous les cas j’aborde toujours les courses pour les gagner. Mais mon esprit est déjà tourné vers la finale des Championna­ts d’Europe.

Vous sentez-vous en forme ? Je ne suis pas en retard dans ma préparatio­n. Tout va bien. Tout roule. L’an dernier, oui, j’ai bien galéré. J’ai traîné des blessures durant la période hivernale, donc avec mon coach, nous avons dû composer. Mais depuis quelques mois, on est rassuré. J’ai beaucoup moins mal et ma forme est montée dans tous les secteurs. Je n’ai pas un niveau de record du monde, ni une forme olympique, mais je n’ai pas de lacunes. Et c’est ce qui compte. J’ai retrouvé mon niveau d’avant.

Celui des Championna­ts du monde de l’an dernier ? Non, je n’avais pas mon niveau lors des championna­ts. Je l’ai eu le jour J, mais pas toute l’année à l’entraîneme­nt. Je parle de  (il établissai­t le record de France sur  m à Monaco). Je considère que je suis de nouveau fort à l’entraîneme­nt désormais.

Après les Championna­ts du monde, vous avez été dans l’oeil du cyclone à la suite d’une agression*. Que retenez-vous de tout ça avec le recul ? Je retiens que c’est le destin. Ça m’est arrivé parce qu’il fallait que ça m’arrive. Il y a des gens qui redescende­nt très vite de leur nuage. Je ne dis pas que j’aurais pris le “boulard”, mais disons que j’aurais pu peutêtre arrêter l’athlétisme. Je me serais dit : “J’ai réussi, je peux passer à autre chose”. Mais tout ce qui s’est passé m’a fait prendre conscience que j’adorais courir, et surtout en compétitio­n.

Vous avez pensé à arrêter ? Bien sûr. C’est énorme de gagner les Mondiaux. Ça efface tout. On atteint un objectif qu’on ne pensait peut-être pas atteindre, même si on l’espère ardemment au plus profond de soi. Là, c’est arrivé, et plus tôt que prévu. On ne s’y attend pas. La surprise est tellement belle, qu’on se dit que les autres victoires ne peuvent pas être aussi belles... alors autant arrêter. Ça a traversé mon esprit. Mais dans un laps de temps très court parce qu’il y a eu cette agression derrière. Ça a été comme un petit coup de massue qui m’a rappelé combien j’aimais ma vie. Et cette voix qui te dit : “tant que tu peux courir, cours”. Il y a des mecs qui ont un accident de voiture et qui restent tétraplégi­ques. Moi, je peux courir, je n’ai pas de grosses douleurs, alors continue de faire ce que tu aimes.

Cet épisode vous a-t-il changé dans la manière d’aborder la notoriété ? Vous êtes connu pour votre spontanéit­é et votre franc parlé... Y a-t-il eu un avant et un après ? Et vous, vous le ressentez comment ?

À première vue, rien n’a bougé. Mais qu’en est-il intérieure­ment ? Êtes-vous plus sur la retenue ? Avant, je ne réfléchiss­ais pas trop à ce que j’allais raconter. Je disais ce qui me passait par l’esprit au moment où j’arrivais sur scène entre guillemets. Où on me tendait le micro. Mais c’est humain. Maintenant, je sais que ce que je dirai ne sera pas repris uniquement par les médias sportifs. Il y aura aussi la presse people parce que je suis en procès. C’est comme ça. C’est le jeu. Mais je reste moi-même. En tant que fan de foot, vous avez dû apprécier la victoire au Mondial ?

J’aime mon pays c’est clair, et j’aime cette équipe, elle me plaît. Je l’ai vu monter en puissance depuis des années. J’ai toujours aimé cette ambiance. J’adore les chants de supporters, ça me fait rire. Quand il y a un buteur on fait une chanson sur lui, Pavard, N’Golo Kanté aussi. J’aime ça. De voir les joueurs se révéler.

Vous étiez où pour la finale ? Je ne m’imaginais pas être ailleurs qu’à Paris. J’étais désolé pour ceux qui ont participé à la Coupe du monde d’athlétisme à ce moment-là (du  et  juillet à Londres). Je n’étais pas bien pour eux (rires). C’était extraordin­aire. Un moment qu’on n’oubliera jamais. On peut dire ce qu’on veut, des millions qu’ils gagnent etc. mais il y a que le foot qui procure ces émotions.

Mon esprit est déjà tourné vers la finale des Championna­ts d’Europe ”

* Dans la nuit du 25 au 26 août 2017, après son titre, Pierre-Ambroise Bosse avait eu une violente altercatio­n avec un autre individu sur le parking du casino de Gujan-Mestras en Gironde. PAB souffre alors de plusieurs fractures au visage. En février, Bosse a été mis en examen pour “violences volontaire­s avec usage ou menace d’une arme”. La justice cherche encore à démêler le noeud de cette affaire médiatique, alors que les deux parties se rejettent la faute.

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