Philibert projette son film sur le Débarquement en plein air
Le Mémorial du Faron diffuse, mercredi en plein air, le film du réalisateur Christian Philibert sur le Débarquement de Provence. Son expo permanente met aussi en avant un film d’André Neyton
Il se dit obsédé par la mémoire. Il l’est au moins autant par la Provence. Christian Philibert. l’auteur des Quatre Saisons d’Espigoule, a réalisé, en 2014, Provence août 1944, l’autre Débarquement. Un pur documentaire à partir des archives de l’armée et de témoignages d’historiens comme Jean-Marie Guillon, spécialiste de cette période (1). Il se regarde pourtant comme un film palpitant, à la dramaturgie musicale décuplée par la voix du narrateur, Charles Berling, galvanisé. Diffusé en 2014 sur France 3 Marseille, pour les 70 ans du Débarquement du 15 août 1944, il l’a ensuite été en national, réunissant plus d’un million de spectateurs. Le Mémorial du débarquement et de la libération de Provence, au Faron, à Toulon, qui en propose habituellement des extraits le fera redécouvrir en intégralité, lors d’une projection en plein air, mercredi. Une façon plus vivante de vivre les commémorations. « C’est important de connaître sa propre histoire, celle de son territoire. C’est quand même la plus grosse opération militaire qu’il y ait jamais eu en Provence », rappelle Christian Philibert, toujours prêt à bousculer la Grande histoire.
Comment vous êtes-vous intéressé à ce sujet ? J’ai passé dix ans à La Seyne, où chaque année, il y a ces commémorations à l’échelle locale. Encore que, de temps en temps, il y a un président qui vient, tous les dix ans… Je sentais bien qu’il y avait un vrai sujet, d’autant que ça n’avait jamais été traité dans un documentaire. J’avais commencé un peu à y réfléchir dans les années , puis j’avais laissé tomber. Deux ans avant les commémorations des ans du Débarquement, Laurent Moënard, qui est scénariste et historien, m’a sollicité (il est coauteur du documentaire, Ndlr). Il avait lui-même écrit un livre sur le sujet. Il fallait le faire tant que des témoins étaient encore vivants.
Pourquoi n’y a t-il pas eu d’autres docus avant ? On l’évoque un peu avec Jean-Marie Guillon dans le film : on n’imagine pas le pays des cigales se prêter à ces grandes opérations militaires. Est-ce que le fait que ce soit une armée d’Afrique qui libère le territoire pose problème ? On préfère le fait que ce soient les Anglais et les Américains qui nous aient libérés ? Je ne sais pas, c’est étrange. Il est certain que le débarquement de Normandie avec Omaha Beach a énormément marqué les esprits. Et effectivement, celui de Provence a fait beaucoup moins de morts. Il était très bien préparé, les Allemands étaient affaiblis, même s’il y a eu pas mal de morts. Il y a des personnages hors du commun comme les goumiers, soldats marocains, « des combattants exceptionnels », comme le reconnaît le lieutenantcolonel Sorensen… Oui, l’enjeu artistique était qu’on regarde ce film comme un vrai film de guerre. C’est toujours mon désir de fiction qui me pousse à faire de tels documentaires. Ma passion de l’histoire que je voulais mettre au service de la fiction… Je trouve ce compromis du documentaire pour l’exprimer, parce que je n’ai pas les moyens de me lancer dans des fictions historiques. Après, passer du temps avec des historiens, je ne m’en lasse pas.
Quels sont vos projets ? Je réfléchis pas mal au web documentaire, qui présente l’avantage de pouvoir contenir beaucoup plus d’informations. Je pense qu’il y a quelque chose à faire autour de cela, pour cristalliser la mémoire et la rassembler, une chose qui m’obsède. J’ai un projet de création d’une base de données historiques qui puisse se mettre à jour, où l’on puisse trouver toutes les références possibles. J’ai passé ma vie à collecter des données, des informations, des iconographies sur des tas de sujets historiques. Et, pourquoi pas, imaginer des festivals autour de l’histoire de notre région... Je suis convaincu du potentiel de l’Histoire, même au niveau du tourisme. Je crois à l’Histoire. Dans les écoles, que nous enseigne-t-on de l’histoire locale ? Rien, la plupart du temps. Dans deux ans, par exemple, ce sera l’anniversaire de la peste de , qui a ravagé la Provence. Pas grandchose lui est consacré…
On n’imagine pas le pays des cigales se prêter à ces opérations ”
1. Image : Patrick Barra. Mercredi, projection en plein air à 21h15, à proximité du Mémorial, suivie d’un échange avec le réalisateur et le professeur Jean-Marie Guillon, gratuit sans réservation. Restauration possible, tables de piquenique. Parking possible et ouverture du
téléphérique jusqu’à 0h30. (de 18h à 21h visite libre du Mémorial du débarquement et de la libération de Provence pour les porteurs de bleuets, dernières entrées à 20h15).