Var-Matin (Grand Toulon)

« Je ne peux plus la garder

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« Il était dans une boîte, en plein soleil. Il m’a fait de la peine», se souvient cette dame, qui s’y est attachée. «Il avait 5 ans, je l’ai gardé pendant dix ans. Je me suis bien renseignée sur ce dont il a besoin. Mais maintenant, il fait le bazar, il veut se sauver. J’ai une clôture, mais l’autre jour je ne le trouvais plus dans le jardin. J’ai peur qu’il se fasse écraser, je veux le protéger. » « Même si nous la recueillon­s, elle aura le même comporteme­nt avec d’autres tortues, elle essaiera de partir, tente Romain Levasseur. Ces tortues sont solitaires dans la nature. Quand le mâle croise une femelle, ils s’accouplent, mais ne vivent pas ensemble. » La discussion tourne en rond. Stéphane Gagno, directeur adjoint du centre, arrive : «Ce n’est pas une espèce protégée, vous pouvez le garder ». Élizabeth insiste : « Je voudrais qu’il ait des copains, ce sera le cas ici ». « Ce sont des animaux solitaires », lui répète le soigneur, mais la maîtresse de César est bien décidée à s’en défaire, même si elle a la gorge qui se noue lorsqu’elle en parle. Elle est en train de prendre conscience des conséquenc­es de son achat d’il y a dix ans.

L’acheteur suscite le marché

D’autant que Stéphane Gagno lui fait la leçon, avec pédagogie : « Nous, on n’a pas les moyens de les ramener dans leurs pays d’origine. En achetant une tortue, vous entretenez le marché. Derrière il y a des trafics, des tortues qui sont prélevées dans la nature ou élevées dans des conditions déplorable­s, et un très grand nombre d’entre elles meurt dans les transports avant d’arriver dans les magasins. Voilà pourquoi il ne faut pas les acheter ». Élizabeth encaisse le coup et se défend : « J’ai plusieurs amis qui m’avaient demandé de leur en acheter une et de leur ramener, j’ai refusé. Moi, je savais que j’allais bien m’en occuper ». Romain Levasseur, qui examine la bête sous toutes les coutures, confirme : «Elle est en bonne santé, vous l’avez bien soignée». Elle précise aussitôt : « Je lui faisais même des soins reiki ».

(1) Devant tant de sincérité, le directeur adjoint accepte de récupérer César : « On a un peu de place pour cette espèce, on va la garder ». Placée dans une boîte en plastique, elle sera mesurée, pesée, pucée, et le centre fera toutes les démarches administra­tives pour déclarer cette nouvelle pensionnai­re, qui sera mise ensuite en quarantain­e. Élizabeth fait quelques photos avec son animal, avant de le confier définitive­ment au village des tortues, en essuyant quelques larmes… 1. Il s’agit d’une méthode de soins non convention­nelle d’origine japonaise, fondée sur des soins dits énergétiqu­es, par imposition des mains.

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Élizabeth a confié César au village des tortues.

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