La malédiction du ministère de l’Écologie
Ceux qui triturent leur téléphone portable depuis mardi matin dans l’espoir d’un appel de Matignon devraient se méfier. Le ministère de l’écologie est l’antichambre de l’enfer politique. Le plus sûr moyen de désespérer un jour de l’action publique. Un maroquin maudit pour un grand nombre de ceux qui l’ont porté depuis sa création en 1971. Alain Juppé, Ségolène Royal, Nathalie Kosciusko-Morizet, mais aussi François Fillon, (cumulant le portefeuille avec celui de Premier ministre), Alain Juppé ou Jean-Louis Borloo ont tous vu leurs ambitions contrariées après y être passés.
Jusqu’à Nicolas Hulot, jugé par les Français le meilleur d’entre nous sur les dossiers environnementaux, rincé, essoré au point de quasi craquer mardi matin au micro de France Inter, dans un douloureux cri d’impuissance. Sur le papier, c’est pourtant le job rêvé : un budget qui dépasse les 10 milliards d’euros, un plan d’investissements sur cinq ans frisant les 20 milliards pour « accélérer la transition énergétique ». Mais un ministère sans doute trop exposé, suscitant de grandes impatiences tant les urgences environnementales et la puissance des lobbys contraires sont grandes. Un véritable casse-pipe. Alors qui pour combler la vacance de Monsieur Hulot ? Le retour d’un vieux briscard comme Jean-Louis Borloo ou Ségolène Royal qui ne s’y sont pas assez brûlé les ailes ? Un associatif qui accepterait de passer sa candeur et ses illusions au broyeur du principe de réalité ? Ou un anonyme. C’est bien les anonymes. Personne ne connaît la ministre de la Défense, Florence Parly et pourtant elle gère loin de la furia médiatique l’un des plus gros budgets de l’État : 43 milliards dépensés cette année ! Il est sans doute tentant pour le pouvoir en place de désigner un homme ou une femme de confiance, pour s’épargner un autre psychodrame avant la prochaine Présidentielle. Pourquoi pas à la faveur d’un remaniement où l’on s’échangerait les délégations comme l’on se passe la rhubarbe et le séné. Mais à quoi servirait ce ministère, s’il n’était pas servi par une grande voix, une conscience qui éclairerait les choix d’un pays, la France, qui est clairement à la pointe du combat international pour préserver l’avenir de la planète ? A ce compte, un seul coup de téléphone s’impose : « Allô, monsieur Hulot, vous ne voulez pas revenir sur votre décision ?»