PORTES OUVERTES AUX MAISONS CLOSES ?
La députée du Var Valérie Gomez-Bassac a relancé le débat en déclarant que l’idée de la réouverture des maisons closes ne devait pas être écartée. Les avis sont contrastés. Nos lecteurs y sont plutôt favorables.
En déclarant qu’elle n’écartait pas l’idée de leur réouverture, la députée Valérie Gomez-Bassac ne mesurait pas la portée de ses propos. Dans le Var, les escorts de luxe côtoient les rescapées de camps de réfugiés, avec en toile de fond une loi de 2016 qui peine à être appliquée
La prostitution est un thème qui, de tout temps, a irrigué la littérature et les arts. Deux films français, Sauvage et Shéhérazade, viennent de traiter le sujet frontalement. Dans une veine réaliste, loin de l’artifice poétique. Une plongée sans concession dans un quotidien précaire, aux antipodes du regard décalé des réalités que certains semblent encore avoir sur cette douloureuse exploitation corporelle. En cette fin d’été, la députée de la 6e circonscription du Var, Valérie Gomez-Bassac, en visite à la brigade de gendarmerie de La Roquebrussanne, plaidait de son côté pour un « retour des maisons closes » dans l’Hexagone. Des propos qui ont rouvert de manière enflammée le débat sur la prostitution et ses lieux dédiés...
Le pire des enfermements
Dans le Var, elles seraient quelque 250 à pratiquer dans la rue, dont plus de 90 % d’étrangères pour une moyenne d’âge de 35 ans. « Des chiffres très compliqués à confirmer», modère toutefois Muriel Huré, déléguée du Mouvement du Nid (lire par ailleurs) qui va ponctuellement à leur rencontre à travers le département. « Sur Toulon, on les retrouve vers la gare, avenue Vauban, le long du Zénith, vers la préfecture... Surtout des Nigérianes car il ne reste plus que quelques Roumaines depuis que le réseau a été démantelé l’an dernier. À Brignoles ou Le Muy, elles exercent sur les routes l’après-midi, aux Arcs près de la gare. À Port-Fréjus, il y a les “salons de massage”», à Saint-Tropez les escort de luxe qui sont, elles aussi, impossibles à recenser, etc.», énumère celle qui a répondu par une lettre cinglante aux propos de la députée varoise. « La prostitution est un sujet complexe dont il ne faut pas parler à la légère ! Vous voulez les enfermer alors que, comme me le disait une personne qui a connu les maisons closes avant la loi de Marthe Richard en 1946, “l’enfer de cet enfermement était le pire que l’on puisse imaginer” ». «Plus récemment, la police espagnole a libéré du Club Dallas 23 jeunes Roumaines, dont trois majeures seulement... Elles étaient toutes brûlées à la cigarette et n’avaient depuis des mois que quatre heures par jour pour se reposer. Rendement oblige ! La presse espagnole en a à peine parlé et en France, nous n’en avons eu qu’un faible écho. En 2017, nos délégations ont rencontré 5 861 personnes sur le trottoir. Je peux vous dire qu’aucune d’entre elles ne rêve de maison close où c’est l’abattage. D’ailleurs, dans les pays “régularistes”, où la prostitution devient un métier, beaucoup préfèrent la rue », conclut Mme Huré à l’attention de l’élue basée à Rocbaron, muette en retour.
Crime organisé
« Oui, les maisons closes existent en Catalogne, Allemagne et Pays-Bas. Mais ces pays s’interrogent sur ce modèle ultralibéral qui feint de penser que la prostitution pourrait être une activité professionnelle comme une autre. Ils se rendent compte que les personnes qui “travaillent” sont en fait des étrangères exploitées, de plus en plus souvent des mineures et les propriétaires, des représentants du crime organisé », tranche Me Charpenel, pour qui ce remugle d’un autre âge n’est pas plus envisageable en milieu clos qu’en bordure de trottoir.