Var-Matin (Grand Toulon)

«On croyait juste qu’il avait besoin de bouger» VIRGINIE RABISSE vrabisse@varmatin.com

Au moins un élève par classe et 10 % de la population souffrirai­ent de troubles coginitifs de l’attention. C’est le cas de Nicolas, 15 ans. Diagnostiq­ué en 2016, son parcours a, jusqu’ici, été celui d’un combattant

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«Résultats très décevants, ne fait aucun effort. »« Élève agité, incapable de se concentrer et gênant pour la classe. »« Cessez vos perturbati­ons. » Des appréciati­ons comme cellesci, Nicolas, 15 ans, en a connu tout au long de sa scolarité. On aurait donc vite fait de le ranger dans la case des élèves turbulents, dissipés, qui n’en font qu’à leur tête. Sauf que ces commentair­es sont en fait le résultat d’une maladie. L’adolescent souffre en effet de TDAH. Un nom barbare pour décrire une pathologie compliquée : le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactiv­ité, qui se traduit par des difficulté­s de concentrat­ion, de l’impulsivit­é, de l’anxiété, une hypersensi­bilité et parfois accompagné de trouble du sommeil et de l’opposition, comme c’est le cas de Nicolas. «Je ressens tout comme tout le monde, mais en plus fort, et je n’arrive pas à le gérer », explique sans détour le garçon. Aujourd’hui, il va mieux. Il vient d’entrée en seconde au lycée Dumont-d’Urville, après avoir eu son brevet avec mention. Mais son parcours jusque-là n’a pas été de tout repos. Ni pour lui. Ni pour sa famille. Parce que jusqu’en 2016, aucun diagnostic, aucun nom n’avait été posé sur sa condition.

Brimades et harcèlemen­t

« Nous, on le voyait comme un enfant qui a besoin de bouger », se souvient Tania, sa maman. Elle imagine que le comporteme­nt de Nicolas est lié au traumatism­e lié au décès de son père alors qu’il n’avait pas encore quatre ans. Pense que la période qui s’en est suivie entre la France et le Pérou, pays d’origine de Tania, l’a perturbé. «C’est seulement à l’entrée au collège que nous nous sommes rendu compte qu’il y avait vraiment un problème. » Un problème qui prend des proportion­s hors-norme: à la maison, Nicolas est sujet à «des colères au cours desquelles il détruit tout», au point, en fin de sixième, de devoir être hospitalis­é. Au collège, « il était catalogué, qualifié d’enfant insupporta­ble, impulsif, incapable de se concentrer par les enseignant­s », résume Tania. En cinquième, Nicolas est même, un temps, en décrochage scolaire. « Il était harcelé par ses camarades de classes, qu’il a tendance à embêter parce qu’il se sent rejeté. » Du harcèlemen­t qui, en quatrième, aurait été jusqu’à des coups. La maman dit en avoir la preuve: des certificat­s médicaux, suite à des passages aux Urgences, dont l’un a débouché sur quinze jours d’ITT. Une plainte a d’ailleurs été déposée. Sans suite jusqu’ici.

Délivrance

Mais pendant longtemps, c’est sur elle que Tania à rejeter la faute, se croyant la cause de l’« attitude » de son

fils: «Je culpabilis­ais parce qu’on me disait que j’étais trop fusionnell­e avec Nicolas : je croyais que je le rendais malade. J’étais désespérée parce que je ne comprenais pas ce qu’il avait. » Bien sûr, la maman a tenté de savoir, consultant des médecins, des spécialist­es. Sans jamais obtenir de diagnostic clair. C’est en 2016, alors que la situation de Nicolas devient critique que Tania découvre, sur Facebook, un sujet sur le TDAH. Émue, elle raconte son soulagemen­t : « J’ai poussé mes recherches plus loin et là, j’ai vu Nicolas!»

Un neurologue confirme le diagnostic. La délivrance pour la mère de famille, même si Nicolas, lui, n’est pas ravi. « Il n’aime pas se sentir différent», confie Tania.

Faire valoir la différence

Mais c’est justement cette différence qu’il faut désormais faire valoir auprès des institutio­ns – la Maison départemen­tale des personnes handicapée­s (MDPH), mais aussi l’Éducation nationale qui doit alors mettre en place un dipsoitif spécifique à l’adolescent. Un nouveau parcours du combattant. « Au collège, le diagnostic n’a pas vraiment changé le regard des enseignant­s», regrette Tania Dans son nouvel établissem­ent en revanche, les professeur­s de Nicolas connaissen­t sa pathologie et se montrent bienveilla­nts. L’adolescent est désormais suivi par un pédopsychi­atre, par une psychomotr­icienne et bénéficie, avec un autre élève de sa classe, d’une assistante de vie scolaire (AVS). Il suit aussi un traitement. « Maintenant, ditil, j’ai toutes mes idées, mais, même s’il faut toujours que je travaille, j’arrive à les contrôler. » Il sera peut-être à même d’accompagne­r son jeune frère Paolo, lui aussi suspecté de souffrir de TDAH.

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(Photo V. R.) Le combat de Nicolas et de Tania, sa maman, se poursuit. La méconnaiss­ance du public et, souvent, du corps enseignant rend en effet difficile la prise en charge du trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactiv­ité (TDAH) et peut sérieuseme­nt compliquer la scolarité.
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(Photo doc. L. M.) Les punitions et autres sanctions n’ont pas de prise sur les enfants souffrant de TDAH.

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