«Appréhender ce problème est difficile mais d’importants efforts sont faits»
«Je ne nie pas la douleur des parents et la difficulté des élèves.» Directeur d’académie du Var, Olivier Millangue insiste ainsi sur les efforts faits par l’Éducation nationale pour, non pas seulement accueillir, mais inclure tous les enfants souffrant de handicaps, quels qu’ils soient. Et si, aujourd’hui, «l’institution ne répond pas à toutes les situations, elle les prend toutes en compte». Explications.
Comment l’Éducation nationale prend-elle en charge les enfants reconnus comme présentant des troubles cognitifs (dyslexie, dyspraxie, dysorthographie, trouble de l’attention)? Depuis la loi Handicap de , je peux vous assurer que, même si nous n’avons pas toujours de réponse immédiate, des efforts importants sont faits pour l’inclusion de tous les enfants handicapés: l’investissement de l’État est énorme et nous recrutons chaque année plus d’AVS (assistante de vie scolaire, Ndlr). Tous les quinze jours, je suis en commission de la Maison départementale des personnes handicapées, dont je ressors avec des liasses de notifications. Pour ce qui concerne plus spécifiquement les enfants souffrant de troubles « dys », nous avons ouvert trois classes UlisDys école, à Toulon, Saint-Maximin et Le Muy, ainsi qu’une en collège, à MarcelPagnol, à Toulon. Et je serai amené à poursuivre ce plan.
Comment les enseignants sont-ils sensibilisés à ces troubles lorsqu’ils sont officiellement reconnus? Il est vrai que nous partons de loin. Quand j’ai débuté, on considérait ces enfants comme présentant des « difficultés scolaires ». Aujourd’hui, la préoccupation sur les élèves «dys» n’est pas mise à l’écart et les troubles cognitifs sont pris en charge dans des dispositifs individuels, avec ou sans aide humaine, ou en groupe. Les enseignants sont peu formés, mais ils le sont. En formation initiale et continue, même si la priorité reste d’apprendre aux enfants à lire, écrire, compter. Mais nous avons une spécialiste des « dys » qui s’occupe de sensibilisation: à la demande de chefs d’établissement qui rencontreraient ces situations, nous mettons en place des rencontres, des réunions afin d’informer sur ces questions. Un collège nous l’a d’ailleurs demandé pour cette rentrée (celui où était scolarisé Nicolas, Ndlr).
Mais tant qu’aucun diagnostic n’a été établi, comment les enseignants peuvent-ils reconnaître des enfants souffrant de ces troubles? Ce qui permet de déceler ces problèmes, c’est la professionnalité de l’enseignant. Il est le premier lanceur d’alerte. Mais, bien sûr, lorsque dans une classe de sixième qui compte vingt-neuf ou trente élèves, l’un d’eux semble « agité », il est souvent vu comme un perturbateur. C’est pourquoi il est important d’avoir un regard croisé, entre les enseignants du cycle de l’enfant, le médecin scolaire, qui est formé notamment à faire passer à l’enfant des batteries de tests. Les familles sont bien sûr associées à ces démarches. Dès lors, un PAP (Plan pédagogique particulier, Ndlr) peut être mis en place. Il est vrai qu’appréhender ce problème est difficile et que la ligne entre un enfant difficile et un enfant souffrant d’un trouble n’est pas facile à tracer, ce qui amène souvent des doutes et rend le travail d’alerte compliqué.
Que dites-vous du fait que les choses puissent parfois mal se passer pour ces enfants, avec des enseignants ou des camarades de classe? De façon générale, il y a une idée que je ne peux pas admettre, celle selon laquelle des enseignants puissent « maltraiter » des enfants. Reste que les enseignants – et c’est tout à leur honneur – ont une conscience professionnelle qui les amène à vouloir régler les problèmes qu’ils rencontrent avec des enfants eux-mêmes : en mettant en place des dispositifs pédagogiques ou par leur autorité. Mais un enseignant qui a un doute doit alerter et sortir de cette culpabilité, ce «je n’arrive pas à le tenir», qu’il vit comme un échec.