Var-Matin (Grand Toulon)

Marseille: Édouard Philippe n’a pas convaincu les élus régionaux

Il est venu. Il est parti. Il n’a rien lâché. Si sa mission était de les rassurer, le Premier ministre a échoué hier. Pas de recentrali­sation, affirme-t-il mais des « transforma­tions d’ampleur »

- RÉGINE MEUNIER rmeunier@nicematin.fr

Mercredi soir maires, présidents de Départemen­ts et de Régions lancent l’appel de Marseille pour les libertés locales. Ils réclament plus de décentrali­sation, plus d’autonomie pour mener leurs politiques locales. Ils dénoncent « la technocrat­ie » qui décide des politiques publiques, depuis Paris, sans les concerter, et une recentrali­sation qui leur enlève des compétence­s et de l’argent. Ils n’ont plus celle de l’apprentiss­age par exemple, et semblent de plus en plus certains que le gouverneme­nt va leur enlever la gestion des fonds structurel­s européens, que Renaud Muselier qualifie de 13e mois pour sa région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur. Hier matin, Édouard Philippe arrive dans la cité phocéenne pour faire le service de déminage, alors que se tient le congrès des Régions de France. Contrairem­ent aux démineurs – les vrais, passés avant lui, pour inspecter le palais du Pharo – il n’a pas Pépite, le chien renifleur d’explosifs.

Le Premier ministre lance “son” appel de Marseille

Mais il a sa tactique : « Je suis d’accord avec l’appel de Marseille » commence-til, avant de dérouler toutes les raisons qui font que le gouverneme­nt ne changera pas d’un iota sa politique et ses méthodes. « Moi aussi je lance mon appel de Marseille : appel à une décentrali­sation qui accepte les désaccords » ditil après avoir invité les présidents de Région, à une réunion de dialogue à Matignon, le 19 octobre prochain. « Il faudra que nous parlions de tout, notamment d’orientatio­n et des structures de distributi­on des fonds européens » précise-t-il.

“La décentrali­sation irréversib­le”, mais...

A propos de la répartitio­n des compétence­s, il affirme que « la décentrali­sation est incontesta­ble et irréversib­le » mais aussi qu’il a « engagé une réorganisa­tion territoria­le de l’État pour mettre fin aux doublons qui existent » ; ou encore « que la répartitio­n des compétence­s entre l’État et les collectivi­tés locales mais aussi entre les collectivi­tés ellesmêmes, doit permettre de corriger ce qui peut l’être et doit l’être, et d’accentuer sur certains sujets, cette décentrali­sation. » Parmi les exemples qu’il cite : la lutte contre la pauvreté, pour laquelle « de grandes transforma­tions ont été engagées. » Une « bataille », relèvent les élus locaux dans leur appel de Marseille, qu’ils mènent « au quotidien, au plus près du terrain.» Mais ils n’ont pas été consultés, affirment-ils. Au premier rang trois ministres écoutent sagement Édouard Philippe : Élisabeth Borne, ministre des Transports, Frédérique Vidal, ministre de l’Enseigneme­nt supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, et Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale. Hervé Morin, président de Régions de France, et Gérard Larcher, président du Sénat, qui menaient la fronde la veille, font de même.

« On est toujours le bec dans l’eau »

La fin du discours arrive. Pas de débat. Tout le monde se sépare. Les trois ministres s’en vont participer à des ateliers. Une conférence de presse plus tard, Hervé Morin et Renaud Muselier font, le même constat. « Nous n’avons pas eu le quart du début du commenceme­nt d’une réponse ! Nous restons clairement sur notre faim » explique le premier tout en annonçant que les élus régionaux répondront à l’invitation d’Édouard Philippe à Matignon. « On est toujours le bec dans l’eau » estime le second. Reste à savoir si l’appel de Marseille ne restera pas un coup d’épée dans l’eau du Vieux-Port.

 ?? (Photo AFP) ?? Le Premier ministre a laissé, hier à Marseille, un sentiment de frustratio­n. Le constat est amer pour Hervé Morin et Renaud Muselier qui déclarent rester « sur leur faim ».
(Photo AFP) Le Premier ministre a laissé, hier à Marseille, un sentiment de frustratio­n. Le constat est amer pour Hervé Morin et Renaud Muselier qui déclarent rester « sur leur faim ».

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