Var-Matin (Grand Toulon)

Procès Pastor à Aix-en-Provence : les moments clés de la semaine

Dix personnes sont jugées jusqu’au 19 octobre aux assises pour les assassinat­s à Nice, en mai 2014, de la richissime femme d’affaires monégasque Hélène Pastor et de son chauffeur Mohamed Darwich

- BENOÎT GUGLIELMI

Le 6 mai 2014, vers 19 heures, Hélène Pastor, héritière d’un empire immobilier monégasque, est visée avec son chauffeur par des tirs sur le parking de l’hôpital l’Archet à Nice. Elle venait de rendre visite à son fils Gildo, en convalesce­nce après un accident vasculaire cérébral. Les deux victimes, criblées de plombs, grièvement blessées, succombero­nt quelques jours plus tard. Alors que s’est achevée vendredi la deuxième semaine de ce procès-fleuve, prévu pour durer jusqu’au 19 octobre (lire nos éditions précédente­s), notre envoyé spécial Grégory Leclerc livre ses impression­s d’audience.

L’ambiance générale après deux semaines

« J’ai trouvé qu’il y avait encore beaucoup de tension dans l’air, et de tous les côtés. Entre avocats d’abord : les charges d’Éric Dupont-Moretti, le défenseur de Wojciech Janowski, sont rudes envers les conseils des parties civiles, ainsi que l’avocat général. Ces derniers ont l’impression que le théâtral pénaliste donne une masterclas­s, à servir ses leçons de droit aux uns et aux autres. Sur le bancs des parties civiles, où tous ne réagissent pas avec la même vigueur, la tension est également palpable. Tandis que Sylvia RatkowskiP­astor, compagne pendant 28 ans du commandita­ire présumé, attend de la justice qu’elle fasse la lumière sur le drame, son frère Gildo ne doute pas de la culpabilit­é de Janowski. »

Le moment le plus fort

«L’audition de Wojciech Janowski, jeudi, durant près de sept heures. On attendait beaucoup de ses explicatio­ns. On a face à nous quelqu’un qui se dit innocent. On se fait l’idée de quelqu’un qui se débat, qui crie… Mais pas lui. Dès son propos liminaire, il est entré directemen­t dans les considérat­ions financière­s : ses comptes dans une banque monégasque, ses virements, ses mensualité­s, ses propriétés… D’emblée, ça a créé un énorme malaise. Son avocat a même été obligé d’intervenir tant son client était à côté de la plaque. »

La phrase qui a marqué les esprits

«Un propos qu’aurait tenu Wojciech Janowski, chez lui, en 2013, pendant une séance de sport : ‘‘Je cherche quelqu’un pour liquider la vieille’’. Phrase rapportée par le coach sportif Pascal Dauriac, à qui elle était adressée, lors de son audition mercredi. Elle a vraiment frappé l’assistance. Même si elle n’a pas réagi, on a senti Silvia PastorRatk­owski accuser le coup… »

Le moment le plus révélateur

« Encore pendant l’audition, jeudi, du présumé commandita­ire. Vraiment l’un des moments-clés de ces quatre semaines d’audience. On a peut-être vu alors le vrai visage de Janowski : autoritair­e, coupant à tout bout de champ la parole (y compris au président de la cour d’assises !), pinaillant sur chaque mot, corrigeant l’avocat général… Lui qui se retranchai­t, après sa garde à vue, derrière sa mauvaise compréhens­ion du français a démontré tout l’inverse. Il s’exprime certes avec un fort accent polonais mais démontre une réelle maîtrise de la sémantique. »

Le tournant

« Les aveux de Pascal Dauriac vont certaineme­nt beaucoup peser dans la suite des débats. Le coach sportif de Janowski est la pierre angulaire de l’accusation. Et il semble fatigué, on sent qu’il a envie de parler. Depuis son interpella­tion, il répète la même chose : qu’il a été manipulé par un Janowski soufflant le chaud et le froid, entre cadeaux somptueux et vexations. Dauriac a très bien expliqué le mécanisme qui l’aurait conduit à ça. Et vraiment, tout en encaissant les coups, il paraît dire sa vérité et être prêt à en payer le prix. Alors quand Janowski affirme, pour sa défense, avoir été manipulé par Dauriac, on peine un peu à y croire… »

Le moment le plus surprenant

« Pas un moment en particulie­r mais plutôt une succession de séquences. Plus le procès avance, plus on s’étonne que ce projet funeste soit allé jusqu’au bout. Avec tous ces bras cassés et ces pieds nickelés… Tant de fois cette machinatio­n aurait pu avorter. Jusqu’à la nuit précédent le drame, quand le tireur s’est finalement désisté et qu’il a fallu le remplacer au pied levé par le premier volontaire croisé dans une cité de Marseille. »

Le moment le plus cocasse

« Sans doute l’audition de Patrick Boffa, ce détective privé qu’Hélène Pastor sollicitai­t régulièrem­ent pour enquêter sur son gendre. À Nice-Matin, nous l’avions rencontré quelques mois après le drame et il nous avait raconté ce qu’il savait. À notre suite, d’autres médias l’avaient interrogé. Éric DupontMore­tti l’a malmené et, toujours très emphatique, lui a notamment reproché d’avoir fait son autopromot­ion dans les médias. ‘‘Vous voulez de la pub? Je vais vous en faire’’, lui a clamé le conseil de Janowski avant d’égrener, devant une assistance médusée, son numéro de téléphone personnel. »

le moment le plus attendu de la troisième semaine du procès

« Les grands moments d’émotion semblent passés mais on peut s’attendre à des débats intenses la semaine prochaine. Les accusés seront de nouveau entendus, à commencer par Wojciech Janowski. Quand il détaillera ses affaires financière­s, on sera au coeur de l’affaire. »

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(Photo Franz Chavaroche) Les charges d’Éric Dupont-Moretti, le défenseur de Wojciech Janowski, sont rudes envers les conseils des parties civiles, ainsi que l’avocat général.

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