Nouvelle polémique autour de la chasse àlaglu
La LPO attaque les arrêtés de prélèvement de grives et de merles pouvant être capturés aux gluaux. Des chiffres jugés au contraire trop faibles par les chasseurs qui ont vu le ministre hier
Alouettes, grives, merles noirs, vanneaux et pluviers dorés. Ce sont les espèces pour lesquelles le ministère de la Transition écologique et solidaire a fixé des quotas de prélèvement. Ces oiseaux sont concernés par des techniques de chasse traditionnelle qui diffèrent d’un territoire à l’autre: filets et matoles pour attraper les alouettes dans le Sud-Ouest, tenderie pour les grives et filets pour les vanneaux et pluviers dorés dans les Ardennes, gluaux pour les grives et merles noirs dans les départements de la région Sud Paca (sauf les HautesAlpes). Le sujet a fait l’objet d’une consultation publique, entre le 24 juillet et le 14 août. Près de 24 000 avis ont été exprimés, majoritairement défavorables à ces pratiques et à la reconduction des quotas.
Bataille sur le terrain juridique
Présente dans le Var, la chasse à la glu est autorisée sous conditions. Il faut être détenteur d’un permis spécial, l’exercer sur un territoire autorisé, respecter la liste des espèces pouvant être capturées par ce biais, et résider dans le département. Mais aussi, respecter les quotas fixés par le ministère, qui pour la saison de chasse 2018-2019, sont au niveau des prélèvements effectivement réalisés et déclarés par les chasseurs dans chaque département la saison précédente. Soit 12 200 gluaux (grives et merles noirs) pour le Var. Cette décision du nouveau ministre, François de Rugy, irrite autant les défenseurs des animaux que les chasseurs (lire ci-dessous). Pour la Ligue de protection des oiseaux (LPO), ça ne passe pas. Après avoir attaqué en 2017 l’arrêté ministériel cadre sur les chasses traditionnelles de 1989 et les arrêtés ministériels fixant les quotas pour quatre départements du Sud-Est, l’association continue son combat juridique. Elle vient de lancer une procédure contre les arrêtés préfectoraux du Var et du Vaucluse pour la saison en cours 2018-2019. « Nous nous apprêtons également à déposer nos recours contre les cinq arrêtés ministériels au Conseil d’État » ajoute le service juridique. Elle ne manque par d’arguments s’agissant du piégeage à la glu des grives et merles noirs. Le premier, et non des moindres, est que « cette pratique est non sélective puisque n’importe quel oiseau peut se retrouver englué » explique Yves Verilhac, directeur de la LPO. « Nous avons proposé à l’association de défense des chasses traditionnelles de commander conjointement une étude indépendante pour voir si c’est sélectif et dans quel état sont les oiseaux. La réponse a été négative. Cela veut tout dire ». Lors d’une enquête sur le terrain menée à l’automne 2017, les équipes de la LPO ont découvert des installations de gluaux à hauteur des passereaux et pas seulement des migrateurs, et des preuves que d’autres espèces, dont certaines sont protégées, se font prendre, ainsi que des cartouches avec des plumes d’une autre espèce non ciblée. « Or, on n’a pas le droit de tirer quand on colle » ajoute-t-il. Les grives et merles noirs sont capturés à la glu pour servir d’appelants. Le directeur de la LPO estime que « les chasseurs n’étant pas soumis à l’obligation de relâcher les appelants en fin de saison, le quota s’ajoute à l’important prélèvement de
(1) ces espèces par tir au fusil ». Il émet des doutes sur les capacités de l’administration à contrôler le respect des prises.
Les autres oiseaux capturés en sursis
Autre grief : malgré l’obligation de relâcher les spécimens d’autres espèces, ceux-ci ont peu de chances de survie. C’est notamment le cas des petits passereaux, tels que les mésanges, les rouges-gorges, en raison des séquelles liées aux gluaux : « articulations démises en se débattant, mutilations, plumes arrachées par la glu, intoxication à cause des solvants chimiques utilisés aujourd’hui pour décoller les oiseaux alors que traditionnellement cette opération se faisait avec de la cendre. Les vétérinaires nous disent que c’est une catastrophe », selon Yves Verilhac. (1) Plus de 2,5 millions de grives et merles noirs en France d’après l’enquête nationale sur la saison 2013-2014.