Persuadé qu’il veut le gazer, il torture un ami toute la nuit
Séquestré, ligoté, battu, humilié, menacé… la nuit du 23 au 24 août restera dans la mémoire d’un jeune toulonnais comme celle d’un interminable cauchemar. Hier, devant le tribunal correctionnel, il a pourtant dû revivre une nouvelle fois le souvenir de ces sévices à l’occasion de la comparution leur auteur. Face à la justice, Thierry A, 42 ans, la peau sur les os, le visage anguleux et le regard dur. Dans son survêtement aux couleurs de la Squadra Azzura, Il présente déjà 22 mentions sur son casier, et ne semble pas impressionné par l’enjeu d’un rendez-vous en comparution immédiate. « Je reconnais les faits, allez go! », lance-t-il sans ciller aux magistrats. Les faits, ils sont pourtant qualifiés de « terrifiants »par Me Freyria, l’avocat de la victime. «Une nuit d’horreur », confirme le procureur. Selon ce qui a été retracé à la barre, dans cette fameuse nuit, Thierry A. a proposé à un ami qu’il croise à deux pas de son domicile du Jonquet, de venir boire un verre chez lui. Une invitation en forme de guet-apens. À peine assis, « l’invité »se voit illico ligoté avec des fils électriques et du ruban adhésif. Avec un sabre, son « ami » lui taillade l’oreille. Il le frappe avec une manivelle, lui explose le nez à coups de pieds et le menace avec un revolver. Froidement, il lui promet la mort au petit matin.
« Je m’amuse un peu »
Une séance qui dure des heures et est ponctuée par les SMS que le bourreau envoie à son ancienne fiancée. « Je m’amuse un peu avec lui », « je le tarte un peu », « Juste une petite balafre »... Les menaces n’iront heureusement pas plus loin. En fin de nuit, la victime est libérée et alerte la police. Pour les enquêteurs, identifier l’auteur et l’interpeller ne pose pas de grand problème. Comprendre ce qui l’a motivé est une autre affaire. Aucun contentieux sérieux ne semble en effet exister entre le suspect et sa victime. Pourquoi alors lui avoir infligé une telle séance de torture ? « Parce qu’il fait partie du groupe qui s’amuse à gazer mon appartement avec des tuyaux d’échappement », explique en substance le suspect au cours d’auditions confuses et parfois contradictoires. Les policiers parviennent à établir que, depuis des semaines, le suspect est en effet persuadé que des gens lui en veulent et tentent de le gazer. Des voisins confirment qu’il leur a demandé d’effectuer des patrouilles dans le quartier et des inspections de son domicile. Les pompiers ont même été appelés… pour rien. Sa mère confie enfin lui avoir acheté un masque à gaz. Problème, aucun élément tangible ne vient confirmer la réalité de cette menace. Se pose alors la question de la santé mentale du prévenu… et donc de sa responsabilité pénale. Une double question qui donne du fil à retordre à la justice. Depuis le mois d’août, elle tente – en vain – d’obtenir une expertise psychiatrique complète. Elle avait même renvoyé l’affaire dans ce but. Durant l’enquête, à trois jours d’intervalle, la médecine avait conclu à des pathologies psychiatriques... puis à leur absence. Faute d’expertise disponible depuis fin août, c’est sur la base d’une expertise ancienne, relative à une précédente affaire, que le tribunal examine l’affaire. Elle écarte la maladie mentale au profit de troubles de la personnalité de type paranoïaque.
Paranoïa et toxicomanie
Des troubles aggravés par la consommation massive de drogue. «Cannabis, cocaïne, héroïne… Je prends tout », assume le prévenu bravache. « Ces élans de sadisme sont extrêmement préoccupants. C’est quelqu’un de dangereux », tonne le procureur au moment de requérir 5 ans de prison assortis de 5 ans de suivi sociojudiciaire. En défense, Me Oudot regrette que les incertitudes sur l’état mental de son client persistent. « Si responsabilité pénale il y a, c’est une responsabilité atténuée et vous devez en tenir compte. Il s’agit d’une personne d’une grande vulnérabilité. » Le tribunal prononce finalement une peine de 4 ans de prison dont un avec sursis-mise à l’épreuve. La victime de son côté attend des expertises complémentaires sur son traumatisme pour plaider des dommages et intérêts.