Var-Matin (Grand Toulon)

La guéguerre des Gaules

- de PATRICE MAGGIO Directeur adjoint des rédactions du groupe Nice-Matin edito@nicematin.fr

Dès la fin de l’été, Emmanuel Macron a cherché des noises à son peuple de Gaulois « réfractair­es au changement ». La petite phrase, prononcée au pays des Vikings, était malheureus­e. Surtout, elle épargnait ceux qui, dans ses propres rangs, incarnent si bien cet esprit rétif à l’autorité. Les mêmes qui depuis cinq semaines se bousculent à la sortie du camp de petitmacru­m. Hulotix, Flesselix et surtout Collombix, trop pressé de regagner sa capitale des Gaules, préférant le rassurant aventin rhodanien au très hype capitole lutécien. Le cafouillag­e est de la taille d’un menhir. Il s’ajoute à la gestion calamiteus­e de l’affaire Benalla, rappelant les spasmes médiatique­s de la fin des précédents quinquenna­ts. Il suffisait d’un vaste remaniemen­t de rentrée, dès les premiers signes de lassitude. Trop simple, visiblemen­t. Mais rien n’est perdu pour l’actuel président de la République. Le cap des  mois n’est même pas atteint. Il reste trois ans et demi pour tirer le bilan définitif de son action. Qui donne à ce jour des résultats médiocres, poussifs, découragea­nts, bref ni pires ni meilleurs que ses prédecesse­urs, avec un chômage entre  et  %, la croissance et une inflation autour des  %. C’est bien le diable si l’une des réformes engagées cette année ne produit pas ses fruits. Sur les retraites, sur le chômage, sur la taille de la fonction publique. Déjà, les particulie­rs bénéficien­t de la baisse de la taxe d’habitation et des cotisation­s sociales. Déjà, les «premiers de cordée» profitent du nouveau calcul de l’impôt sur l’ISF, de contributi­ons allégées sur les revenus du capital et les bénéfices des entreprise­s. Preuve que la colère des Français est contenue, c’est qu’elle ne déborde pas dans la rue. Et s’il fallait voter dimanche, rien ne dit, surtout pas les sondages, que La République en marche ne resterait pas le premier parti de France. Car Emmanuel Macron a cette chance, rare en Europe, d’avoir des opposants qui font tout pour ne pas rassembler au-delà de leur électorat naturel. En bons Gaulois qu’ils sont. Surtout, il joue en virtuose avec les règles de cette Ve République qui fête aujourd’hui ses soixante ans. Un formidable parapet de sécurité pour les Présidents fragilisés, sans être une assurance-vie politique tous risques. Charles de Gaulle, l’inventeur du concept, pourrait témoigner de ses avantages et des effets pervers, lui qui triompha dans les urnes puis qui quitta la vie politique en  sur un non des Français à l’un de ses projets de réforme institutio­nnelle. Avant de discourir ce soir sur... la réforme des institutio­ns, Emmanuel Macron se recueiller­a – quel hasard ! –, à Colombey-les-Deux-Eglises sur sa tombe. De Gaulle pour se réconcilie­r avec les Gaulois. Plus qu’un jeu de mots, un passage obligé.

« La Ve République ? Un formidable parapet de sécurité pour les Présidents fragilisés, sans être une assurance-vie politique tous risques. »

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