COMMENT INVERSER LA TENDANCE
La hausse moyenne des températures que les experts internationaux du climat veulent contenir à 1,5°C est déjà atteinte en plaine, comme au Luc et approche 2°C en montagne, dans le Mercantour
Hier, près de personnes ont manifesté, en France – dont plus de à Toulon – pour le climat. Cette même journée, des records de température ont été établis dans plusieurs villes. Et notre région est particulièrement exposée. « Il est encore temps », même si les rapports des experts ne sont pas très optimistes.
Il paraît dérisoire ce petit 1,5°C que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) décrit, dans son dernier rapport, comme la barre fatidique à ne pas dépasser. D’autant plus dérisoire qu’il s’agit de la hausse moyenne des températures par rapport à l’ère préindustrielle. Autrement dit, il y a plus de cent ans. Pourtant, il est lourd de conséquences. Ce seuil est déjà atteint dans certains secteurs, comme l’arrière-pays varois. Il est même dépassé dans les Alpes-Maritimes, où il est de l’ordre de 1,8 dans le Mercantour. Cela signifie, explique le GREC-SUD – équivalent du GIEC au niveau régional – que d’ici 2050, ces territoires seront à + 2,5°C, voire davantage, par rapport à l’ère préindustrielle.
L’été commencera fin avril-début mai
Dans les prochaines décennies, les étés commenceront de plus en plus tôt. Dans trente ans, ils arriveront fin avril-début mai, se termineront fin septembre-début octobre. Dès le mois de mai, la température pourrait dépasser les 35°C, voire davantage à l’intérieur des terres. Le littoral sera un peu plus protégé grâce à l’influence de la mer. Certaines villes, comme Marseille, Nice ou Toulon, auront les mêmes températures qu’Alger, ou même Bizerte en Tunisie. Les périodes de sécheresse seront plus longues. Il y aura moins de pluies en été et plus en hiver. Les épisodes de pluies extrêmes seront potentiellement plus intenses, de même que les tempêtes.
°C à l’ombre durant les canicules
Lors des périodes de canicule au coeur de l’été, qui seront plus nombreuses, la température pourra monter jusqu’à 45-50°C à l’ombre après 2050. Ce phénomène sera accentué à l’intérieur des terres, comme à Draguignan dans le Var mais aussi dans les Alpes-Maritimes comme dans la plaine du Var, le fleuve ! Selon Philippe Rossello, géographe et coordinateur du GREC-SUD, « on peut s’attendre à une augmentation importante des nuits tropicales. Qu’est-ce qu’on entend par nuit tropicale ? C’est une nuit où la température ne descend pas en dessous de 20°C. On est passé de quinze nuits tropicales à Nice dans les années soixante, à plus de 60 aujourd’hui. Et d’ici 2050, ce sera davantage.» Il y aura des effets dominos sur les paysages et le quotidien des gens, expliquent les experts du GREC-SUD, qui publient leurs travaux sur le site www.grec-sud.fr. Avec plus de deux millions d’habitants dans le Var et les Alpes-Maritimes, la prise de conscience individuelle va peser énormément, à travers des gestes qui ne nécessitent pas forcément un investissement financier : par exemple, prendre en masse les transports en commun pour réduire l’émission de CO2 par les automobiles. Le CO2 qui est le gaz à effet de serre par excellence. Cependant, la lutte contre le changement climatique n’est pas de la responsabilité du seul citoyen. Les décisions politiques devront être exemplaires, sur l’énergie en particulier. « La centrale biomasse à Gardanne est plutôt une aberration », estime Hendrik Davi, chercheur à l’Inra en écologie des forêts méditerranéennes, à Avignon: «Il faut sortir du nucléaire et des énergies fossiles mais brûler du bois pour produire de l’énergie. » Selon Wolfgang Cramer, chercheur au CNRS à Aix-en-Provence et coauteur du dernier rapport du GIEC, « à chaque décision, y compris politique, il faut s’interroger : est-ce qu’elle est cohérente avec la lutte contre le changement climatique ? »