Charlie Hebdo saute sur Châteauvallon
La semaine prochaine, la scène nationale accueille deux représentations du spectacle tiré du dernier livre de Charb, le directeur de Charlie Hebdo, tué dans l’attentat de janvier 2015
Que reste-t-il de l’esprit « Je suis Charlie » ? Près de quatre ans après l’attentat qui a décimé la rédaction du journal satirique et bouleversé l’opinion publique, la réponse à cette question se trouve – entre autres – dans l’accueil réservé au spectacle Lettre aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes, proposé mercredi et jeudi à Châteauvallon. Tiré du livre de Charb (que le dessinateur a validé deux jours avant de perdre la vie), il est mis en scène sous forme d’une lecture ponctuée de musiques et de dessins par le comédien Gérald Dumont. Le propos : expliquer les concepts de laïcité et de liberté d’expression, tels que les concevait le directeur de publication de Charlie, lassé de se voir traiter de raciste.
Polémiques en série
Un message qu’on pourrait imaginer recevoir un accueil bienveillant et consensuel, en écho à l’émotion nationale qui a suivi l’attentat de janvier 2015. Il n’en est rien. Au fil des dates, le spectacle et la séance de discussion qui le suit, créent des polémiques sur leur passage et doivent composer avec les annulations de dernière minute, les autocensures timides et les mobilisations hostiles. À Paris, à Lille ou en Gironde, le rendez-vous a quitté la rubrique culture pour glisser dans les pages d’actualités.
« Deux France »
« Très concrètement, des villes qui avaient accepté de faire des représentations de cette pièce ont reculé au dernier moment parce qu’il y avait des pressions religieuses », s’agace Claude Ardid, journaliste à Charlie Hebdo et intervenant dans le débat qui suit la lecture. « Ce qu’on observe, c’est qu’il y a deux France. Une qui accepte cette pièce comme un spectacle pédagogique sur la laïcité et une France pour qui on n’a pas le droit de caricaturer, ni de blasphémer. » Pas de polémique de ce registre à signaler pour l’instant dans l’aire toulonnaise et, des années après une première liaison au moment de l’arrivée du FN à la mairie de Toulon, l’histoire de Châteauvallon recroise celle de Charlie .« On a tout de suite adhéré, assure Stéphane de Belleval, directeur de la communication et des relations publiques de la scène nationale. D’abord parce que la programmation est pensée dans la cohérence de la fête du livre et après parce qu’un lieu comme le nôtre est précisément fait pour permettre d’entendre ce genre de choses. Même s’il est vindicatif, c’est un texte essentiel sur le thème de la laïcité. »