Var-Matin (Grand Toulon)

Rendez-vous au tribunal après les manifs

Deux jeunes majeurs impliqués dans les scènes de violence urbaine, jeudi dernier, ont écopé de peines de prison ferme. Ils devraient néanmoins échapper à l’incarcérat­ion

- C. G.

Les heurts violents entre policiers et manifestan­ts, jeudi, dans le centre-ville de Hyères, ont donné lieu à une série d’interpella­tions. Si plusieurs mineurs ont été présentés à un juge des enfants, deux jeunes hommes de 18 ans ont dû s’expliquer, vendredi, devant le tribunal correction­el de Toulon. Et comme pour leur laisser le temps de méditer sur leurs actes, les deux fauteurs de troubles ont été les derniers appelés à la barre, sur le coup des 21 heures, après plus de sept heures d’audience.

Doigt d’honneur et bousculade

Le premier d’entre eux, Thomas (1), visage d’enfant, n’a pas trop l’air de comprendre ce qu’il fait là. Ce reserviste dans l’armée, qui aspire à intégrer l’école de sous-officiers de SaintMaixe­nt, ne parvient pas non plus à expliquer ce qu’il faisait au milieu de la foule hostile qui cherchait à en découdre avec les forces de l’ordre. « J’étais venu pour observer », affirme ce fils de gendarme. « Vous aviez une casquette et une capuche. Vous aviez froid à la tête ? », ironise la présidente du tribunal. Mais au delà de l’habillemen­t, le problème de l’adolescent, c’est son majeur tendu en direction des forces de l’ordre. « Le doigt d’honneur, c’était vers des amis à moi, pas vers la police », tente d’expliquer Thomas. Avant de se raviser, poussé dans ses retranchem­ents par la représenta­nte du parquet. « Je reconnais l’avoir fait, c’est la manif... on était beaucoup », bredouille le prévenu. Qui a également dû expliquer pourquoi, lors de son interpella­tion, il a poussé violemment à terre une policière, blessée au poignet. Là encore, ses explicatio­ns peinent à convaincre : « Les agents m’ont mis à terre, en tombant, j’ai voulu me rattraper à quelqu’un... » Des faits d’outrages et de rebellion qui conduisent le ministère public à réclamer une peine exemplaire. « On ne peut pas accepter de tels agissement, sinon c’est l’anarchie. » Le Parquet réclame quatre mois de prison ferme. Me Oudot, l’avocat de permanence, en charge de la défense de Thomas, rappelle le profil de son client, sans aucun antécédant judiciaire et aux résultats scolaires impeccable­s. «C’est l’innocence qui est bousillée dans cette histoire. Il se passe quelque chose de fou en ce moment. » Thomas écope finalement de deux mois de prison ferme. Sans mandat de dépôt, ce qui signifie qu’il ne devrait pas passer par la case « La Farlède » et bénéficier d’un aménagemen­t de peine. La juge n’a pas non plus ordonné l’inscriptio­n de la peine dans le casier b2, ce qui laisse au prévenu une chance de poursuivre sa carrière dans l’armée.

Jet de pierre sur les policiers

Passant juste après à la barre, Hichem a également

(1) le profil d’un jeune sans histoire. Habitant du centre Var, il est pensionnai­re dans un lycée hyérois. Jeudi, en fin de matinée, il a fait partie des quelque 200 jeunes qui ont jeté divers objets sur les forces de l’ordre. Beaucoup d’oranges, mais aussi des pierres. C’est le cas d’Hichem qui a propulsé un projectile venu s’écraser sur le bouclier d’un policier. Quelques instants plus tard, les agents lancent une charge et interpelle­nt le jeune majeur. « J’ai été bête, je ne recommence­rai plus, j’ai honte », assure le lycéen. « Où avez-vous trouvé les pierres ? », interroge la présidente du tribunal. « Par terre », assure Hichem. « Et les pierres qui se trouvaient dans votre sac?» « Elles datent de la manifestat­ion de mardi », répond le jeune, sans se rendre compte qu’il n’arrange pas son cas. Claire Diwo, la juge, évoque la lourde peine qu’il peut encourir. La procureur se dit « dépitée par ces abrutis », et requiert une peine de 6 mois de prison ferme. Maitre Oudot, en défense, évoque « un gamin immature », qui s’est mêlé à la foule « pour impression­ner les filles ». Hichem écope finalement de quatre mois de prison ferme, qu’il pourra lui aussi aménager, après une visite chez le juge d’applicatio­n des peines. Avant de lever l’audience, la juge lui glisse un dernier conseil. « Retenez une fois pour toutes : jeter des pierres sur des policiers, ce n’est pas sexy, ça ne marche pas pour impression­er les filles. »

1. Les prénoms ont été modifiés.

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(Photo d’illustrati­on L.M.) Plusieurs interpella­tions avaient eu lieu autour des débordemen­ts .

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