Le charançon rouge est là pour toujours
Les paysages typiques de notre littoral appartiennent-ils d’ores et déjà au passé ? Une chose est sûre : les palmiers, végétaux emblématiques de certaines communes varoises, vont se faire de plus en plus rares. Victimes de l’appétit vorace des charançons rouges, dont la population ne cesse de grossir depuis le premier spécimen repéré sous nos latitudes en 2006. Dans un rapport à paraître aujourd’hui, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) affirme en effet qu’il est « quasiment impossible d’arriver à éradiquer la population de charançons rouges du palmier», et que toute tentative en ce sens est « une course inutile et perdue d’avance ».
Sauver les seuls palmiers patrimoniaux
Directeur du laboratoire de la santé des végétaux à l’Anses, Philippe Reignault précise : « Dans la zone dite méditerranéenne, on est désormais condamné à vivre avec le charançon rouge ». Mais qui dit vivre avec, ne signifie pas nécessairement ne rien faire. Bien au contraire. Pour Philippe Reignault qui rappelle que « la lutte contre l’insecte nuisible est obligatoire », deux objectifs, plus réalistes que l’éradication, s’offrent désormais aux acteurs locaux. Le premier, le plus ambitieux, consiste « à stabiliser la population de charançon rouge, à en contrôler son extension géographique, afin de réduire au maximum son impact sur la mortalité des palmiers ». L’autre alternative, sans doute plus économique, mais peut-être plus difficile à faire accepter, est « de mettre le paquet sur les seuls palmiers déclarés comme d’importance patrimoniale ». Ce qui revient dans le même temps à abandonner un très grand nombre d’arbres au charançon rouge. L’Anses ne le nie pas puisque dans ses conclusions, elle recommande de « proposer des espèces végétales de remplacement ».
La piste du piégeage de masse
Mais quelle que soit la stratégie choisie par les acteurs locaux, « pour être efficace, la lutte contre le charançon rouge doit faire appel à une combinaison de méthodes », insiste Philippe Reignault. Parmi les procédés retenus par l’Anses, on trouve : l’injection de benzoate d’émamectine, ou encore les applications de Beauveria et de Steinernema. Mais aussi, et c’est nouveau, le recours au piégeage de masse. « La méthode ‘ ‘attract-and-kill’’, bien que n’étant pas encore (totalement) opérationnelle sur le terrain, est potentiellement très intéressante », peut-on lire dans le rapport. Elle n’a d’ailleurs pas échappé à Sébastien Régnier, de la Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles de Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Si ce dernier ne peut que constater l’étendue des dégâts causés par le charançon rouge – « rien que dans le Var, quelque 15 000 palmiers ont été infestés en dix ans. La plupart sont condamnés », glisse-t-il – cette nouvelle méthode vient enrichir, un peu tard certes, la boîte à outils disponible contre l’insecte nuisible. « À condition que la phéromone utilisée pour attirer le charançon n’attende pas cinq ans pour bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché ».