Jean-Michel Blanquer en VRP de sa réforme à Nice
Journée dense hier à Nice pour le ministre de l’Éducation nationale en déplacement officiel, qui a eu l’occasion d’échanger avec quatre lycéens sur des sujets qui les préoccupent
Journée marathon, hier, pour le ministre de l’Éducation nationale, à Nice. Interviews, signatures, quelques sifflets de syndicalistes à son arrivée à l’école Auber de Nice – où il est intervenu sur le devoir de mémoire – puis le dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France en fin de soirée. Le premier prof de France s’était toutefois ménagé une vraie pause dans la journée. Elle n’apparaissait pas dans l’agenda officiel. Une rencontre avec quatre lycéens, hier soir, sous les ors du palais préfectoral. Rien d’anodin, alors que les manifs lycéennes – et leur lot de débordements – ont envahi les rues de France. Le ministre macroniste surnommé « Contrôle Z » pour
(1) sa propension à effacer les réformes de ses prédécesseurs, est engagé dans une opération déminage auprès des lycéens. « Il n’est pas question de céder à la pression de la rue», avait-il déclaré il y a quelques jours au plus fort des manifs, jouant la fermeté. Hier, point de rodomontades. Mais une opération miséduction, mi-communication à laquelle Nice-Matin a pu participer en observateur.
Une rencontre informelle
Face au ministre, quatre lycéens. Pas franchement du genre lanceur de pavés. Ils manifestaient toutefois il y a quelques jours contre les réformes Blanquer. Tous ont été triés sur le volet et participent au Conseil académique de la vie lycéenne (CAVL). «Je suis un peu tendu. En lui parlant, on s’adresse à l’Éducation nationale », glisse Valentin Simoncelli, 16 ans, avant l’arrivée du ministre. Il est en première ES au lycée Apollinaire. La feuille de route : une rencontre informelle. Mais difficile d’oublier les quatorze personnes – on a compté – écoutant l’entretien. Parmi elles, le recteur, l’inspecteur d’académie, et le cabinet du ministre. Rien que ça. Intimidant. Les lycéens ont eu près de quarante-cinq minutes – entrecoupées d’un direct du ministre avec France 3 – pour évoquer les thèmes qui leur tenaient à coeur. Les maths, l’absence des sciences économiques et sociales dans le tronc commun – avec une citation de Michel Rocard (si, si) – ou les programmes scolaires. Axel Martin, 15 ans, en seconde au lycée Estienne-d’Orves, costume-cravate noir, s’inquiète des sujets posés au Bac 2021 avec l’introduction des « spécialités ». Le coeur de la réforme. Jean-Michel Blanquer écoute, attentif : « Il y aura une banque de données de sujets, des centaines et des centaines, discipline par discipline. (...) L’un des buts est de vous mettre en situation de travailler en continu et de répartir votre effort. »
«Le scandale actuel, c’est le taux d’échec»
D’une voix toute fluette, Yasmin Tariq, 16 ans, en première à Calmette, interroge le ministre sur le risque de rupture d’égalité entre lycées avec la réforme Blanquer. Le ministre rejette le risque et affirme que les « spécialités » seront équitablement réparties entre établissements. Droit comme un « i », Valentin attaque sur les effectifs. « Nous sommes 34-35 dans ma classe. J’ai entendu parler de suppressions de postes. Si on a moins de profs, on sera plus nombreux ? » Le ministre affirme que par le truchement des heures supplémentaires, les effectifs seront plus homogènes au lycée. «Au lieu d’avoir une classe à 20 et une à 35 vous aurez des classes à 30. » Valentin semble peu convaincu. Axel Martin, 15 ans, en seconde à Estienned’Orves, interroge sur la manière dont il pourra choisir le thème du futur grand oral du bac. « Vous présenterez un sujet qui vous passionne. Vous le choisirez en lien avec vos professeurs. » Sourire. La réponse satisfait. Le ministre fait le job et défend son action. «Le scandale actuel, c’est le taux d’échec très important dans l’enseignement supérieur », insiste-t-il. Caroline Méric, 17 ans, en terminale L à Estienne-d’Orves, s’inquiète, elle, du manque de médecine du travail pour les professeurs. Sa maman est prof d’italien. « Ça, c’est pas la réforme du lycée », s’amuse le ministre. « C’est un vrai sujet sur lequel nous travaillons avec les organisations syndicales. Un de mes grands buts, c’est le bien-être au travail du personnel. Ça renvoie au pouvoir d’achat, à la formation continue et évidemment à la santé. Ça va progresser de ce côté. » «Agréable», «naturel», les lycéens ont semblé plutôt contents à la sortie. «Ila pris le temps. »