Var-Matin (Grand Toulon)

La patate chaude

- L’ÉDITO de THIERRY PRUDHON Reporter edito@nicematin.fr

Le Grand débat accouchera-t-il d’un pic démocratiq­ue, ou plutôt d’une souricière qui ajoutera du b… à la chienlit ? Mercredi à Montpellie­r, Nicolas Sarkozy s’est fait taquin : « On va demander l’avis aux gens dans la rue pour faire quelque chose. Avec ça, vous ne ferez plus rien ! Si pour faire quelque chose, tout le monde doit être d’accord, restez couchés, personne n’est jamais d’accord. » Si l’anarchie fonctionna­it, cela se saurait, effectivem­ent. En ouvrant un dialogue sans bornes autres que celles de la non-violence, l’exécutif s’expose à toutes les exigences. La libération institutio­nnelle de la parole aura pour double et inévitable corollaire la surenchère et l’éparpillem­ent. Deux écueils qui seront acérés par la décentrali­sation des débats. La dispersion des échanges sur tout le territoire n’est certaineme­nt pas anodine. Elle va permettre au pouvoir de refiler aux maires un bout de la patate chaude qui le consume. Le résultat est à peu près connu : moult doléances localisées vont venir s’agréger aux colères hexagonale­s. A quinze mois des municipale­s, cela promet un joyeux foutoir, non dénué d’arrière-pensées. Car ne rêvons pas : la majorité silencieus­e le restera en grande partie, quand les causeurs profession­nels monopolise­ront le crachoir. Bon courage donc à ceux qui, début mars, devront ajuster le curseur de la raison pour caler des propositio­ns qui ne pourront ni décevoir ni céder à l’extravagan­ce. Avant même que le Grand débat ne démarre, on a eu ces jours-ci un avant-goût de provocatio­n fiérote… L’intransige­ance utopiste des « gilets jaunes » s’est doublée de l’idéalisme belliqueux des écologiste­s : quatre ONG ont lancé une pétition, qui a déjà réuni plus d’un million de clics, dans le but d’attaquer l’Etat en justice pour «ses

décennies d’inaction contre les changement­s climatique­s ». En , Alain Peyrefitte, dans son Mal français, brossait le portrait des Gaulois en « conservate­urs contestata­ires», pénétrés de pensée magique et enclins à un « immobilism­e convulsion­naire ». Le peuple français a-t-il grandi ? Contraint à un dialogue susceptibl­e de tourner vinaigre, Emmanuel Macron fait un pari sur notre intelligen­ce collective. Il est osé.

« Emmanuel Macron fait un pari sur notre intelligen­ce collective. »

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