Var-Matin (Grand Toulon)

Macron repasse à l’offensive pour rebondir en 

Le président de la République a dit comprendre la colère qui s’est exprimée depuis six semaines, tout en condamnant fermement les dérives et débordemen­ts, et sans nouvelles annonces

-

Emmanuel Macron a adopté un ton pugnace et offensif hier pour ses voeux 2019 en appelant à « l’unité retrouvée » des Français après la crise des « gilets jaunes», qui démontre que la France n’est « pas résignée ». Le chef de l’État a également utilisé des termes forts pour dénoncer « les porte-voix d’une foule haineuse » et affirmer, dans une allusion aux débordemen­ts des dernières semaines, que « l’ordre républicai­n sera assuré sans complaisan­ce ». « Je suis au travail [...] Je crois en nous », a conclu le président qui a présenté durant un quart d’heure ses voeux debout, sans pupitre.

«Une colère qui venait de loin »

Sans jamais citer explicitem­ent les « gilets jaunes », Emmanuel Macron a évoqué « de grands déchiremen­ts et une colère qui venait de loin : colère contre les injustices, contre le cours d’une mondialisa­tion parfois incompréhe­nsible, colère contre un système administra­tif devenu trop complexe »… «Cette colère a dit une chose à mes yeux, quels que soient ses excès et ses débordemen­ts: nous ne sommes pas résignés. Notre pays veut bâtir un avenir meilleur reposant sur notre capacité à inventer de nouvelles manières de faire et d’être ensemble. Telle est à mes yeux la leçon de 2018. » Mais « que certains prennent pour prétexte de parler au nom du peuple [...] et n’étant en fait que les porte-voix d’une foule haineuse, s’en prennent aux élus, aux forces de l’ordre, aux journalist­es, aux juifs, aux étrangers, aux homosexuel­s, c’est tout simplement la négation de la France », a-t-il fustigé. Il a également mis en garde contre le « déni flagrant de réalité » dans lequel « nous nous sommes installés » : « On ne peut pas travailler moins, gagner plus, baisser nos impôts et accroître nos dépenses, ne rien changer à nos habitudes et respirer un air plus pur ». Le chef de l’État n’a pas fait de nouvelles annonces sociales, trois semaines après son allocution télévisée du 10 décembre au cours de laquelle il avait annoncé 10 milliards d’euros d’aides en faveur du pouvoir d’achat pour tenter de répondre aux demandes des « gilets jaunes ». Cette absence de nouveaux gestes a été immédiatem­ent critiquée par certains « gilets jaunes » mobilisés sur de nombreux sites en France. «Il a rallumé le feu, il a décrété qu’il ne ferait rien pour nous aider. S’il veut rien faire, on restera là comme on l’a décidé » ,a annoncé Marc, 40 ans, qui a regardé l’interventi­on avec une quinzaine de personnes près du Mans. « Franchemen­t, il est sourd, il ne montre aucun signe d’apaisement. Les gens vont continuer de plus belle », a averti Rabah, 52 ans, qui avait prévu de fêter le réveillon sur le pont d’Aquitaine à Bordeaux. Les opposants de droite et gauche ont également critiqué les voeux d’Emmanuel Macron, dont « le ton un peu martial» va « sans doute renforcer la mobilisati­on » des « gilets jaunes », selon Adrien Quatennens, député LFI. « Ce président est un imposteur » et « un pyromane », a lancé Marine Le Pen dans deux tweets successifs.

Une lettre aux Français dans quelques jours

Emmanuel Macron a par ailleurs annoncé qu’il écrirait aux Français « dans quelques jours » afin de préciser les contours du grand « débat national » qui sera lancé en début d’année. Ce débat « doit nous permettre de parler vrai » ,a précisé le président, qui entend aller à la rencontre des maires, chargés de l’organiser partout en France. Il a cependant dénoncé la désinforma­tion, les « manipulati­ons » et les « intoxicati­ons » qui sapent selon lui la « confiance démocratiq­ue ». « On peut débattre de tout » mais « débattre du faux peut nous égarer, surtout lorsque c’est sous l’impulsion d’intérêts particulie­rs ». Le chef de l’État a par ailleurs confirmé qu’il entendait lancer en 2019 les réformes de l’assurancec­hômage, des retraites et de la fonction publique. Et laissé entrevoir une future réforme des institutio­ns : « Nous devons redonner toute notre vitalité à notre démocratie ». Le début de 2019 recèle d’autres embûches, comme la mise en place de la prime d’activité d’une centaine d’euros pour les petits salaires. L’effet de l’entrée en vigueur du prélèvemen­t à la source est une autre inconnue. Se jetant déjà dans la mêlée des prochaines élections européenne­s de mai, Emmanuel Macron a indiqué qu’il proposerai­t dans les prochaines semaines aux Français « un projet européen renouvelé ». « Je crois très profondéme­nt dans cette Europe qui peut mieux protéger les peuples et nous redonner espoir », a-t-il assuré.

 ?? (Photo AFP) ?? Le chef de l’Etat a assuré qu’il maintiendr­ait son cap, assurant que « l’impatience [...] ne saurait justifier un quelconque renoncemen­t ».
(Photo AFP) Le chef de l’Etat a assuré qu’il maintiendr­ait son cap, assurant que « l’impatience [...] ne saurait justifier un quelconque renoncemen­t ».

Newspapers in French

Newspapers from France