Var-Matin (Grand Toulon)

Loïc Malnati : « On a le corps qu’on a, mais on peut le customiser »

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Il a commencé par la bande dessinée. Vingt-cinq albums chez les plus grands éditeurs. Dargaud, Dupuis, Casterman ou Les Humanoïdes associés. Le dernier, intitulé Les Contes

mécaniques, évoque sans pesanteur l’attentat de la promenade des Anglais. Tous les registres qu’il a explorés, depuis le polar jusqu’à la science-fiction, Loïc Malnati les a réunis dans un univers graphique très personnel, mais inlassable­ment imité. Dont le pantin est un emblème facilement identifiab­le et largement partagé sur Facebook, où sa page compte 52 000 followers. Le tatouage, Loïc s’y est initié un peu par hasard, il y a une petite dizaine d’années. S’il a, depuis, raccroché ses outils pour se concentrer sur le pur dessin, Julia, qui réalise ses projets, est une partenaire idéale. Chacun est indépendan­t mais les deux sont complément­aires : « Elle est douée d’une patience infinie, plus attentive à la qualité du résultat

qu’au processus créatif. » À l’orée du Vieux-Nice, le duo reçoit à l’étage, sans vitrine, mais sur rendezvous. Et voit se présenter, de plus en plus régulièrem­ent, des seniors avec une idée très précise de ce qu’ils veulent. Rien d’impulsif. Pas de mode, non plus, ni de normalisat­ion d’un tatouage plus ou moins communauta­ire où, tout en voulant se distinguer, on finit par se ressembler. « Chez les jeunes, l’horloge, la montre gousset, la boussole, le parchemin ou la statue à l’antique ont la cote. Des gens plus âgés ont une idée précise de ce qu’ils souhaitent. C’est un acte mûri, réfléchi. »

Ainsi, Julia vient de tatouer un majordome très chic qui voulait un toréador sur un bras et une danseuse de flamenco sur l’autre. « Le rendu est très beau, mais invisible en tenue. » « Nous avons des banquiers, des policiers, des avocats », assure Loïc qui, à mesure que la clientèle

s’élargissai­t, a creusé son sujet. « On vient pour habiller son corps. Pour en prendre possession, quel qu’il soit. » Il s’explique : « On a le corps qu’on a, mais on peut le customiser. En portant des choses qui nous sont chères. Ou en adoptant une identité dans laquelle on se reconnaît. » Cet « art populaire » auquel son éducation ne l’avait pas préparé est devenu « un terrain de jeu partagé ». Tout en restant cette « coquetteri­e intime » et irréversib­le que l’on s’autorise parfois sur le tard, quand on s’est affranchi de la pression sociale, de l’environnem­ent profession­nel, de la peur du jugement. Le tatouage, en toute liberté.

‘‘ On vient pour habiller son corps. ”

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(Photo Franck Leclerc)

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