Une vocation contrariée d’indic
Le Toulonnais Frank Colin reconnaît avoir participé à l’organisation de l’importation de drogue, mais dans le but d’en tirer profit en dénonçant le trafic aux services de l’État
Àl’entame de la deuxième semaine du procès Air Cocaïne (lire nos éditions précédentes), la cour d’assises spéciale des Bouches-du-Rhône, à Aix-en-Provence a entendu hier trois experts en informatique. Ils avaient eu à analyser les ordinateurs, téléphones portables et clés USB de certains des protagonistes de cette affaire d’importation, via l’aéroport de Saint-Tropez, de cocaïne en bande organisée. L’exposé de leurs conclusions a été assez rapide. Il en est notamment ressorti que, dans un message adressé à Nicolas Pisapia quelques jours avant l’un des vols transatlantiques suspects, Frank Colin lui recommandait : « Prends ton téléphone avec toi. Tu sais lequel. » Frank Colin a convenu sans difficulté qu’il s’agissait d’un téléphone qu’il avait acheté pour cet unique usage, et l’avait remis à son correspondant.
Mystérieux Rayan
Dans la foulée, le président Tournier a invité Frank Colin à s’exprimer spontanément sur toute cette affaire. « J’ai été amené à rencontrer Rayan l’été 2012 en boîte à Saint-Tropez. Il cherchait un moyen d’organiser du transport aérien de drogue. J’ai pris contact avec Alain Castany (dont le procès a été disjoint, Ndlr), qui dès le départ savait de quoi il s’agissait. Mais je n’ai jamais financé l’achat de stupéfiants, ni participé aucun vol. Je ne fais pas partie d’une organisation criminelle. »
Des vols payés d’avance
Revenant sur les trois vols successifs entre décembre 2012 et mars 2013, vers la République dominicaine ou l’Équateur, Frank Colin a indiqué que le tarif du transport était de 230 000 euros pour chaque vol, « payables d’avance, parce que c’étaient les conditions de Castany ». Par qui avaient été payés ces vols ? « Par Rayan. » « Ce Rayan, il est dans la salle, dans le box ? », a questionné le président en lançant un coup d’oeil vers Ali Bouchareb, le seul des accusés à être détenu ? « Non, pas du tout », a répondu Frank Colin.
Candidat indic
Il a ensuite expliqué que, s’il avait adhéré (en apparence) à ce trafic, c’était pour mieux pouvoir le dénoncer aux services de l’État. « J’ai tenté à plusieurs reprises d’entrer en contact avec ces services, avant même le premier vol. J’avais obtenu des informations, et je souhaitais les monnayer. J’ai tenté d’obtenir le statut d’informateur officiel. » Le président Tournier lui a fait observer que les contacts directs qu’il avait pu obtenir avec un agent des douanes et un policier étaient postérieurs à l’arrestation de ses coaccusés à Punta Cana. « Oui, malheureusement c’était trop tard. » La cour entendra aujourd’hui des experts aéronautiques.