Le concours Lépine de la fiscalité
Sans doute saisis par l’euphorie du Grand Débat, les ministres ont ouvert la foire à la fiscalité. Pas un jour ou presque sans que l’un d’entre eux n’ait une idée, un vrai concours Lépine. Tout y passe dans un désordre total. Qu’importe le portefeuille, l’essentiel est de proposer pour ne pas dire déblatérer. Le président du groupe parlementaire LREM trouve, d’ailleurs, cela formidable : du débat, du débat, encore du grand débat, le temps des décisions viendra ensuite. Tout y passe, droits de succession, ISF, niches fiscales, taxation sur les plus-values enregistrées lors de la vente de la résidence principale, modification de la fiscalité sur les donations, retour de l’écotaxe, nouvelles tranches d’impôt sur le revenu ! Ce dimanche, c’était autour de Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires, de lancer son pavé dans la mare en proposant de faire payer l’impôt sur le revenu (IR) à tous les Français ( % d’entre eux qui ont moins de € de revenus annuels ne le payent pas), y compris les plus modestes ( €). Son objectif, louable, « retrouver le sens de l’impôt ». Mais pour montrer son souci de justice, elle suggère en même temps de taxer davantage les revenus les plus élevés, oubliant de rappeler que % de l’IR est payé par les % de contribuables les plus riches. Aussitôt, bien sûr, le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, sans doute agacé aussi que l’on piétine ses plates-bandes, met le holà, soutenu d’une formule par Edouard Phillipe : « Cette piste n’est pas à l’étude. » Sans doute n’en avons-nous pas fini avec cette créativité fiscale. La fin de partie sera sifflée, espérons-le, le mars lors de la clôture du Grand Débat national. Car ce grand défouloir ministériel a de quoi donner le tournis aux Français. Il ajoute de l’incertitude au désordre qui règne dans le pays depuis quatre mois. Or il n’est rien de pire que l’instabilité fiscale. Elle inquiète du haut en bas de l’échelle des revenus. Elle affole également les investisseurs étrangers. C’est l’une de nos grandes spécialités, chaque Président a joué les apprentis sorciers dans ce champ miné. On avait cru comprendre qu’Emmanuel Macron en connaissait les fâcheuses conséquences. N’avait-il pas déclaré durant sa campagne : « Nous mettrons fin à l’instabilité fiscale. Nous ne réformerons pas plusieurs fois un même impôt dans le quinquennat. » Il faut croire que le chef de l’Etat a perdu sa boussole. Cette promesse-là, c’est sûr, ne sera pas tenue. Le climat économique du pays ne peut qu’en pâtir.
« Sans doute saisis par l’euphorie du Grand Débat, les ministres ont ouvert la foire à la fiscalité. »