Var-Matin (Grand Toulon)

Vignoble varois et glyphosate : une oenologue répond à Macron

- PROPOS RECUEILLIS PAR CLÉMENT AVARGUÈS

Le président de la République a annoncé, samedi, le jour de l’ouverture à Paris du Salon de l’agricultur­e son ambition de faire du vignoble français le premier au monde sans glyphosate d’ici à 2022. « Quand je regarde le vignoble français, je pense que nous pouvons en faire le premier du monde sans glyphosate », avait déclaré Emmanuel Macron lors de sa longue visite (quatorze heures !). Cette transition devrait s’effectuer sous trois ans dans la plupart des cas en France, contre cinq à l’échelle européenne. De nombreux vignerons indépendan­ts n’en utilisent déjà plus. Le projet est-il réaliste ? On fait le point en trois questions avec Régine Le Coz, oenologue de 58 ans installée depuis de nombreuses années à Brignoles.

. Cette ambition est-elle réalisable en  ans ?

« Non. Emmanuel Macron rêve. L’alternativ­e au glyphosate, c’est quoi ? S’en passer coûte très cher, au niveau technique, au niveau de la main-d’oeuvre... Il faudrait embaucher en masse, et tout le monde n’a pas la technique requise. Il faut être qualifié pour s’occuper de la vigne. C’est un métier. Il faut de la formation, de la main-d’oeuvre qualifiée... ça prend du temps, et ça coûte beaucoup d’argent. A moins que le gouverneme­nt fournisse des tracteurs et des financemen­ts aux vignerons ! « Ils n’ont pas attendu monsieur Macron pour essayer de se passer du glyphosate. Les produits coûtent cher, les vignerons ne sont pas dingues : s’ils peuvent éviter de traiter, ils le font déjà. On les fait passer pour des mauvais élèves aujourd’hui, ça n’est pas le cas. »

. Ce que dit le Président est-ce un effet d’annonce ?

« C’est surtout de la politique, pas de la réalité. Le Président veut devenir monsieur Propre, mais sur le terrain est-ce que c’est lui qui va venir désherber manuelleme­nt les vignobles français ? S’il veut venir le faire, qu’il vienne, mais sous trois ans il aura du boulot le garçon. »

. Les vignobles varois sont-ils prêts à s’en passer ?

« Non, et les consommate­urs non plus. Qui voudrait payer demain sa bouteille vingt euros au lieu de dix aujourd’hui ? Vu les coûts à court terme qu’impliquera­it une sortie du glyphosate, ce changement n’est pas crédible ici si le gouverneme­nt ne s’engage pas (geste sur les charges sociales, aide matérielle,...). Il n’y a que 5 % de bio dans le Var, et les prix ne sont pas les mêmes que le traditionn­el. »

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