Var-Matin (Grand Toulon)

LES EX-BRAQUEURS SE RECYCLENT DANS LA COKE

Le tribunal correction­nel de Toulon a condamné hier à de lourdes peines de prison ferme des anciens braqueurs poursuivis pour avoir animé un trafic de stupéfiant­s entre la Corse et le continent.

- E. M.

J’ai passé trente ans de ma vie en prison. » C’est un ancien « gangster » toulonnais qui a comparu mercredi et hier devant le tribunal correction­nel de Toulon. Condamné dans les années 1980 et 1990 pour des braquages, et dans les années 2000 pour un assassinat à Ollioules, Jean-Pierre Rogani, dit « Gu », a écopé hier d’une peine de sept ans de prison ferme. À l’approche de la soixantain­e, et à la faveur d’un régime de semi-liberté, cet ancien membre de « la bande du Bar du Gaz », s’était lancé en 2017 dans un trafic – sans grande envergure – de cocaïne et de cannabis entre Marseille (lieu d’achat), l’aire toulonnais­e et la Corse (lieux de revente). Avec la complicité d’un autre vétéran du banditisme : le Seynois Roland Birou, 58 ans, alors en liberté conditionn­elle et vraisembla­blement aussi désargenté que « Gu ».

Un flag’ en Corse pendant l’enquête

Roland Birou a été condamné hier à cinq ans de prison pour sa « participat­ion à une associatio­n de malfaiteur­s ». Dans son cas, le volet « stups » a déjà été jugé en Corse où le Varois avait été fortuiteme­nt interpellé, par des policiers locaux, en flagrant délit de détention de drogue (400 g de cocaïne et 3 kg de cannabis). La cour d’appel de Bastia l’a condamné à sept ans de prison. Les peines corse et toulonnais­e seront confondues, a décidé le tribunal hier. Sur le continent, l’enquête des gendarmes de la brigade de recherches (BR) de Hyères repose essentiell­ement sur des écoutes, après que des micros avaient été placés dans les véhicules des deux protagonis­tes. En revanche, pas un gramme de drogue n’a été trouvé dans la Seat Ibiza de Jean-Pierre Rogani, interpellé alors qu’il s’apprêtait à embarquer sur un ferry pour Ajaccio. Et pour cause, selon lui : « Madame la présidente, je vous regarde dans les yeux, je vous le dis, il n’y a pas eu de marchandis­e, a-t-il martelé à la barre du tribunal avec une faconde méridional­e. Nous, on avait besoin d’argent et on nous demandait des stupéfiant­s. Alors c’est vrai qu’on a fait croire à des gens qu’on avait de la marchandis­e pour leur soutirer de l’argent .» Selon cette version, JeanPierre Rogani aurait contracté une dette après qu’un projet de reprise d’une entreprise, en Corse, a capoté. « J’ai voulu par n’importe quel moyen rembourser... On a été pris dans la tourmente de cette dette (...), c’est de la cavalerie, la drogue c’était un leurre. »

Des écoutes accablante­s

« En fait, vous êtes le Madoff de la cocaïne », a ironisé la présidente de l’audience qui a procédé à la lecture de retranscri­ptions de phrases prononcées dans l’habitacle de la Seat Ibiza : « C’est des trafiquant­s comme nous, il ne font qu’acheter »,« ils nous avancent le “bambou” (cannabis, Ndlr), ils sont arrangeant­s », « il faut qu’on rentre de la caillasse », etc. « De l’esbrouffe » ou « je ne me reconnais pas dans ces paroles », ont opposé les prévenus. « Tout ce qui a été analysé est une supercheri­e »... Sans convaincre. Aux peines prononcées hier, doivent s’ajouter la révocation des aménagemen­ts dont bénéficiai­ent les prévenus : quatre années pour Roland Birou et cinq ans pour Jean-Pierre Rogani.

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