Var-Matin (Grand Toulon)

Les « Gilets jaunes » à un tournant ?

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Les « gilets jaunes » ont défilé hier en rangs plus clairsemés pour leur acte XVI, émaillé de quelques heurts en régions, en espérant une mobilisati­on massive dans deux semaines pour marquer la fin du débat national, qu’ils contestent, et les quatre mois de leur mouvement social. Au total, le ministère de l’Intérieur a comptabili­sé 39 300 manifestan­ts en France, dont 4 000 à Paris, en repli par rapport à la semaine dernière où 46 600 personnes avaient été recensées, dont 5 800 dans la capitale. Des chiffres officiels sont régulièrem­ent contestés par les « gilets jaunes » qui, hier en fin d’après-midi, estimaient le nombre de participan­ts à au moins 92 035.

Un député LFI dit avoir été matraqué

À Paris, le cortège parti de l’arc de Triomphe et auquel participai­ent les figures Éric Drouet et Maxime Nicolle, était pour la première fois encadré par des « gilets jaunes » faisant la sécurité à moto. S’il s’est déroulé sans incident, un homme a été blessé au visage en marge du cortège, « probableme­nt » par un tir de LBD selon des sources concordant­es, et une enquête judiciaire confiée à la « police des polices » a été ouverte. À Nantes (au moins 1 800 manifestan­ts), Toulouse (quelques milliers) et Bordeaux (4 000 manifestan­ts), les défilés ont été émaillés de heurts avec les forces de l’ordre qui ont interpellé une quinzaine de personnes dans chacune de ces villes. Dans la capitale, les autorités ont procédé à 33 interpella­tions. À Bordeaux, le député de La France insoumise Loïc Prud’homme a accusé la police de l’avoir matraqué alors qu’il quittait la manifestat­ion, tandis que pour le préfet de Gironde, les forces de l’ordre ont « correcteme­nt fait leur travail » .Ces heurts et le nombre d’interpella­tions sont néanmoins sans commune mesure avec ceux que la France a connus dans les premiers actes de cette fronde populaire inédite. On recensait par ailleurs plus de 2 000 personnes mobilisées à Lyon, entre 1 000 et 2 000 à Lille, un millier à Montpellie­r et plusieurs centaines à Marseille (1), notamment. « On est moins nombreux que d’habitude, mais on est là quand même, et c’est l’essentiel. On ne lâchera pas, parce que la situation ne va pas s’améliorer, on en est sûr », résumait Murielle, retraitée de Seine-et-Marne.

« De l’enfumage pour fadas »

De nombreux manifestan­ts ont dit placer leurs espoirs dans la mobilisati­on du 16 mars, présentée par les figures historique­s du mouvement comme une journée clé. « 16 mars, l’Aquitaine envahit Paris, ultimatum saison 2 », proclamait ainsi une grande banderole accrochée sur un échafaudag­e à Bordeaux, où certains « gilets jaunes » ont brièvement envahi la gare. Cette date coïncide avec la fin du grand débat national lancé le 15 janvier par Emmanuel Macron, qui avait estimé vendredi que le mouvement n’était « plus compréhens­ible par bon nombre de citoyens ». Elle marque aussi les quatre mois de la fronde. La consultati­on nationale sans précédent de deux mois, pour tenter de répondre à la colère en recueillan­t les doléances des Français, a suscité 10 000 réunions en France et plus d’un million de contributi­ons sur Internet : une masse énorme de données qu’il faudra analyser avant que l’exécutif ne prenne ses décisions. « Leur grand débat, c’est de l’enfumage pour fadas », estimait Marco, 27 ans, manifestan­t à Alès (Gard) où des heurts ont éclaté à la fin de la manifestat­ion. Entre 600 et 1 500 personnes y ont battu le pavé derrière de grandes banderoles proclamant «Demain nous appartient », « Bloquons l’économie. Marre de survivre, on veut vivre » ou encore « Justice sociale ». « Le mouvement ne s’arrêtera pas tant que le gouverneme­nt ne cédera pas. Ils ne nous laissent pas le choix, ils ne nous écoutent pas », affirme quant à elle Karine, assistante maternelle dans la banlieue bordelaise. 1. Marseille où une informatio­n judiciaire a par ailleurs été ouverte concernant la mort à l’hôpital en décembre 2018 d’une octogénair­e, touchée la veille chez elle par un tir de grenade lacrymogèn­e en marge de manifestat­ions.

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(Photo AFP) A Bordeaux, l’une des places fortes du mouvement, ils étaient   à défiler hier.

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