Les algues, la pompe carbone et le pétrole...
Récompensé en 2018 par la médaille de bronze du CNRS, Lionel Guidi, 37 ans, travaille au laboratoire océanographique de Villefranche-sur-Mer, dans les Alpes-Maritimes. Sa spécialité : le cycle du carbone au niveau océanique, dans le cadre d’un mécanisme que l’on appelle la « pompe biologique ». Petite explication de texte. Comme les plantes à la surface de la terre, les algues absorbent du CO2 (dioxyde de carbone) par photosynthèse. Or, elles peuvent entrer dans la chaîne alimentaire ou former des agrégats en se collant les unes aux autres. Lesquels, devenant plus lourds que l’eau, finissent par couler.
Interaction des espèces
En vertu de ce phénomène, le CO2 qu’elles contiennent est transféré vers le plancher océanique : c’est la séquestration du carbone. « Ce qui, à long terme, produit du pétrole, pétrole qui, lorsque l’homme le brûlera, rejettera lui-même du carbone dans l’atmosphère. » Ce qui intéresse Lionel Guidi n’est pas la formation du pétrole, mais l’interaction des espèces dans ce mécanisme de la « pompe biologique ». Qui est d’une grande complexité, son étude consistant, entre autres points, à comprendre comment cette interaction est influencée par des changements, notamment climatiques. Le principe de l’analyse, lui, paraît assez simple : « Au moyen de caméras immergées, on filme une colonne d’eau depuis la surface, jusqu’à 6000 mètres de profondeur, en observant, dans les particules marines et le plancton, tout ce qui est plus grand que 100 microns. »
« L’océan sert de tampon »
On estime que l’ensemble des océans produit 10 à 15 milliards de tonnes de CO2 par an. « Dans cette partie, la pompe biologique représente 2 gigatonnes, dont 10 % par séquestration. » Ces études, in fine, peuvent apporter aux décisionnaires des informations précieuses sur la gestion des océans et sur la biodiversité. « L’océan sert de tampon à ce réchauffement climatique. Sans l’homme, tout serait stable. Or, une légère élévation de la température de l’Atlantique provoque des migrations d’espèces. » C’est un autre sujet, plus politique. La compréhension et la quantification sont, quant à elles, du ressort de la recherche.