Et comment répond la santé
Parmi les professionnels de santé, certains sont plus sensibles que d’autres aux impératifs journalistiques et comprennent davantage la manière dont nous, médias, fonctionnons. Ainsi Michel Salvadori, directeur de l’Institut Arnault Tzanck note que « nous sommes aujourd’hui dans la culture de l’immédiateté. Nous, professionnels de santé, en avons tiré les leçons ces dernières années : nous devons, nous aussi être réactifs et nous montrer disponibles aux sollicitations des journalistes. » En filigrane, il sait que l’article, quel que soit le sujet, sortira avec ou sans son commentaire. Autant jouer le jeu et profiter de l’occasion pour exposer sa position. Lucide, il estime que «le monde de la santé est ambivalent : il sollicite les médias pour mettre en valeur certaines activités par exemple, mais s’irrite lorsqu’il doit affronter des critiques, des remarques, même si c’est justifié. » Son homologue de l’Institut Arnault Tzanck Mougins, Eric Leroy, résume : « Même si le monde médical n’est pas encore tout à fait dans cette optique, il apparaît essentiel que les établissements de santé communiquent. Transparence d’un côté, informations justes de l’autre, c’est la recette d’un bon partenariat. » D’autres établissements sont davantage dans une position attentiste, refusant de répondre à une sollicitation pour diverses raisons, quitte à user d’un droit de réponse a posteriori. Charles Guépratte (CHU de Nice) est clair : « Nous sommes dans le temps de l’action, des soins, et pas dans celui du commentaire. Les médias, comme le monde de la santé ne doivent pas céder à la facilité ; la santé est un sujet complexe, difficile, il faut en tenir compte dans la communication. » D’où ses réticences de temps à autre à répondre « dans l’urgence » à la presse. Michel Salvadori explique, et son point de vue est largement partagé dans la communauté médicale, apporter une attention particulière aux réclamations des patients. « La plupart du temps, il suffit d’explications, de prendre davantage de temps avec certains pour développer. » Finalement, lorsqu’une requête est formulée, et la presse alertée, c’est souvent à cause d’un problème de communication. Il arrive ainsi régulièrement que les journalistes, sollicités par un usager du système de santé, transmettent le message à l’établissement qui va prendre de nouveau contact avec le malade ou ses proches, résolvant du même coup le point d’achoppement. Le Dr Fabrice Tiger, président de CME du CH Antibes-Juan-les-Pins commente : « Selon notre code de déontologie, nous devons défendre le patient avant l’établissement. » Il raconte une anecdote : «Ilyaans, un lycéen antibois avait été hospitalisé pour une suspicion de méningite. Les choses se sont enflammées rapidement, un journaliste m’a appelé en fin de journée mais je n’avais pas le temps de lui répondre. Il m’a dit “si vous ne me parlez pas, je vais écrire n’importe quoi”. Alors j’ai pris le temps et je lui ai expliqué précisément de quoi il s’agissait – une infection à pneumocoque – et qu’il n’y avait donc aucun risque pour la population. Le lendemain, il avait écrit un article en ce sens. Finalement, même si sa méthode a été un peu limite, on a pu donner des informations utiles et éviter qu’une psychose ne s’installe en ville. »