Harcèlement : rester à l’écoute coûte que coûte Prévention
Il n’y a pas d’âge pour souffrir des moqueries, du regard des autres. Mais à l’adolescence, il peut avoir des effets encore plus dévastateurs. Il est impératif de les repérer
Des regards moqueurs, des insultes, des coups... le harcèlement - notamment scolaire - peut revêtir de multiples facettes. Mais s’il y a bien un point commun entre toutes ces formes, c’est bien la souffrance ressentie par les victimes. Des enfants ou adolescents qui bien souvent n’osent pas parler. Par honte ou par peur des représailles. Ils s’enfoncent alors dans une spirale faisant de leur quotidien un enfer. Pourtant, il est possible, pour les adultes qui les entourent, de repérer quelques signes. «Leplus évident, c’est la chute du rendement scolaire, constate le Dr Georges Juttner, pédopsychiatre. L’effondrement des résultats est révélateur du mal-être. »
Repli sur soi
L’enfant souffre, il n’a donc plus le courage de travailler ses cours, qui lui semblent anecdotiques à côté de ce qu’il vit. Autre symptôme : «Le repli sur soi. La victime va se taire, se murer dans le silence. Il sera plus difficile de communiquer avec elle, note le professionnel de santé. Des troubles du comportement, parfois graves peuvent aussi apparaître selon la personnalité de l’enfant. Certains se mettent en retrait quand d’autres adoptent une posture de défense, jusqu’à manifester des crises de colère. » Lorsque l’on souffre, le comportement change. Et même si l’adolescence est une période de modifications, les changements brutaux, qui viennent véritablement surprendre l’entourage, doivent être observés comme la manifestation d’une émotion « Il y a l’idée d’un comportement qui fait figure de rupture par rapport à la situation antérieure », résume le pédopsychiatre. Autre signe facilement repérable si l’on y prête attention, « les changements dans les habitudes vestimentaires. Ils sont associés aux moqueries à connotation sexuelle ou aux actes « Rechercher chez le bourreau ce qui le pousse à agir ainsi »
Dr Georges Juttner à caractère sexuel. Par exemple un jeune ne va plus mettre de jogging, un vêtement mou sur lequel on peut tirer facilement, pour porter plutôt un jean, une ceinture, des bretelles comme s’il voulait se parer d’une armure pour se protéger » , note le Dr Juttner. Si le harcèlement peut concerner tous les âges de la vie, depuis l’école jusqu’au monde professionnel, lorsqu’il survient à l’adolescence, il fait encore plus de ravages.
Il faut aider tout le monde : la victime et le bourreau
« C’est une période au cours de laquelle les propres repères changent. A un moment, le jeune ne sait plus à quoi attribuer la méchanceté : aux autres ou à lui-même. C’est d’autant plus complexe qu’il peut éprouver de la réticence à se confier, il ne veut pas devenir “le traître qui a dénoncé”. » Pour autant, le médecin refuse d’adopter une vision manichéenne. «La bêtise serait de dire qu’il y a des gentils et des méchants. Non, il faut aider tout le monde : la victime bien sûr, mais il faut aussi rechercher du côté du bourreau ce qui le pousse à agir comme ça. N’a-t-il pas ses propres difficultés, par exemple celle de s’intégrer dans le groupe et de lui montrer sa fidélité ? Ne craint-il pas lui aussi d’être exclu du groupe ? En lui tendant la main, il se peut qu’on résolve une grande partie du problème. »
Jusque dans la maison
Il existe une donnée spécifique à notre siècle ; l’avènement du numérique et des smartphones qui fait que l’enfant ne coupe jamais totalement le lien avec les autres. Donc le harcèlement, qui auparavant cessait à la maison, se poursuit désormais à toute heure et en tous lieux. Le Dr Juttner conclut : « La question du harcèlement est un sujet complexe qu’il faut traiter subtilement. Il est impératif d’ouvrir la discussion avec celui dont le comportement a manifestement changé, en faisant preuve d’écoute et de bienveillance. »
Psychiatre