La vis sans fin
Stimulées par la crise des « gilets jaunes » et le Grand Débat national, l’inventivité fiscale et la passion taxatrice connaissent ces jours-ci un nouvel âge d’or. L’imagination est au pouvoir. A La République en marche et au gouvernement, chacun a sa petite idée. Augmentation de l’impôt sur les hauts revenus, retour de l’ISF, rabotage des niches fiscales, taxation des plus-values sur la résidence principale, impôt sur le revenu pour tous (c’est-à-dire pour les % de ménages qui, aujourd’hui, n’en paient pas), hausse des droits de succession, sans oublier la nouvelle taxe carbone, sociale et indolore (?), réclamée par l’aile verte de la majorité : les projets volent en escadrille. La plupart ont été abattus en vol. Un concours Lépine, a-t-on dit. Plutôt un concours de ball-trap. Pour l’heure, une idée tient la corde, plébiscitée par le parti du Président : augmenter l’impôt sur la fortune immobilière. Ce qui s’appelle taper sur le même clou, car l’immobilier est déjà lourdement taxé : droits de mutation ( à %), impôt foncier, IFI au-dessus de , million, droits de succession… Entendons-nous. On a bien compris que la majorité cherche une mesure symbolique pour effacer l’image de « Président des riches » qui colle à Emmanuel Macron. Bien compris aussi que la révolte des « gilets jaunes » et le soutien qu’ils ont trouvé dans l’opinion traduisent une exigence de justice sociale que le gouvernement se doit d’entendre. Mais il y a un hic. Quand un système fiscal et social, pourtant très fortement progressif et redistributif, alimente un profond sentiment d’injustice ; quand, malgré le niveau faramineux des dépenses publiques, on voit s’exprimer sur les ronds-points et dans la France « périphérique » le sentiment d’être relégué, abandonné, de payer toujours plus pour recevoir toujours moins, qui peut croire que la solution consiste à donner un tour de plus à la vis sans fin des impôts et des dépenses ? S’il suffisait de taxer les « riches » pour faire le bonheur du plus grand nombre, ça se saurait. Et Hollande aurait été réélu haut la main. On ne répondra pas à la demande paradoxale des Français (moins d’impôts, plus de service public) par un impôt nouveau, de portée symbolique (ou politique), mais en rationalisant la dépense. Dépenser moins, dépenser mieux. Eliminer la gabegie, les doublons, dissoudre les organismes-fantômes. Voilà sur quoi nos gouvernants devraient cogiter et se montrer créatifs. A ce jour, on n’a toujours pas vu la queue d’une idée neuve. S’ils sont à court d’imagination, ils n’ont qu’à se reporter aux oeuvres complètes de la Cour des comptes – un gisement inépuisable d’économies. Ou mieux, au rapport rédigé l’an dernier à la demande des autorités et intitulé : « Service public : se réinventer pour mieux servir ». Une mine. Il n’y a qu’à creuser.
« On ne répondra pas à la demande paradoxale des Français (moins d’impôts, plus de service public) par un impôt nouveau. »