« Le combat du pot de terre contre le pot de fer »
Éliane Boucharlat est vice-présidente de l’AFTC 06 (Association de familles de traumatisés crâniens). Elle est aussi membre actif de l’Unafam (Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques). Elle est surtout une maman qui n’a jamais renoncé. Jamais abdiqué. « Votre fils restera dans un état végétatif toute sa vie ». Lorsqu’on annonce, il y a 23 ans de cela, à Éliane et son mari, Michel, que leur fils Emmanuel, victime d’un grave accident de ski, est plongé dans un coma dont il ne sortira pas, ils refusent le verdict. Ils vont remuer ciel et terre pour que le jeune homme de 29 ans, promis à un avenir brillant, soit pris en charge dans un centre adapté, à Strasbourg. Emmanuel sortira du coma. Il rejoindra ensuite un centre de rééducation fonctionnelle, et parviendra à récupérer ses jambes et un bras. Mais il souffre de troubles du comportement. Et c’est en hôpital psychiatrique qu’il passe la majorité de son temps depuis des années.
« Une dégradation croissante »
Une situation douloureuse pour lui, pour ses parents. Éliane raconte : « Pour les traumatisés crâniens, comme pour toutes les personnes brutalement atteintes dans leur chair et leur cerveau, nous recherchons le potentiel, le fil rouge à tirer pour avancer… Pour Emmanuel, c’est la musique. L’un de ses amis, sorti du conservatoire de Strasbourg, lui a dit un jour : “Viens voir mon professeur au conservatoire”. Le professeur nous a téléphoné : “Je n’ai pas entendu un timbre de voix basse/baryton aussi intéressant depuis 25 ans parmi mes élèves.” Emmanuel n’a plus la capacité de faire du sport de haut niveau, ni d’avoir une activité professionnelle à la hauteur de ses diplômes, mais il peut chanter un très beau répertoire. » Emmanuel, accompagné par ses parents, va prendre des cours à Strasbourg, puis au conservatoire d’Antibes. « Mais la camisole chimique a eu raison de toutes les initiatives. L’excès de médicaments, mais aussi l’absence de kiné, de rééducation fonctionnelle, de thérapies cognitivo-comportementales et d’activités diverses participent à sa dégradation croissante, physique et mentale », constate tristement Éliane. Avec son mari, pour Emmanuel, mais aussi tous les autres, elle se bat pour que soit améliorée la prise en charge des séquelles des traumatismes crâniens. « Notre combat est souvent celui du pot de terre contre le pot de fer… »