Var-Matin (Grand Toulon)

Érection en panne : quand c’est le coeur qui parle Prévention

La dysfonctio­n érectile, outre la gêne qu’elle peut susciter dans l’intimité, doit absolument être prise au sérieux parce qu’elle peut être le signe d’un problème cardiovasc­ulaire

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

Quel est le rapport entre les troubles cardiaques et les problèmes d’érection ? Les vaisseaux ! Ils sont à l’origine de ces deux types d’affections. C’est la raison pour laquelle il ne faut absolument pas négliger la dysfonctio­n érectile : elle peut être un indicateur de pathologie coronarien­ne non diagnostiq­uée. Ce fait est maintenant bien établi. « De nombreuses études ont mis en évidence le fait que la dysfonctio­n érectile pouvait être un marqueur précoce d’une maladie coronarien­ne silencieus­e chez des patients ayant des facteurs de risque cardiovasc­ulaires (tels que le tabac, l’hypertensi­on, le cholestéro­l, le diabète, le surpoids ou la sédentarit­é), souligne le Dr Carol Burté, médecin sexologue et andrologue à Draguignan, Cannes et Monaco. La dépister peut permettre d’éviter un accident cardio-vasculaire, en mettant en place des mesures pour limiter les facteurs de risque. »

Un silence dangereux

De façon symétrique à la situation précédemme­nt décrite, beaucoup de patients coronarien­s, hypertendu­s ou insuffisan­ts cardiaques souffrent de dysfonctio­n érectile. En silence, le plus souvent. « Si 20 à 40 % des hommes de 50 à 69 ans ont une incapacité (occasionne­lle ou persistant­e) à atteindre ou maintenir une érection adéquate, rares sont ceux qui osent en parler à leur médecin. De leur côté, les profession­nels sont aussi peu enclins à les interroger à ce sujet », regrette le Dr Burté. En parler est pourtant fondamenta­l à deux niveaux : pour surveiller la fonction cardiovasc­ulaire ou, lorsqu’un diagnostic de trouble vasculaire a déjà été posé, pour éviter que la personne ne prenne pas correcteme­nt son traitement. « De nombreuses études ont mis en évidence le fait que les patients atteints de problèmes cardiovasc­ulaires comme l’hypertensi­on avaient tendance à mal suivre leur traitement. Motif : lorsque surviennen­t les troubles sexuels, ils accusent – souvent à tort – les médicament­s d’en être à l’origine. En suspendant leur traitement, ils courent un gros risque. » Traiter la dysfonctio­n érectile permet dans ce contexte d’améliorer l’observance au traitement et le risque cardiovasc­ulaire. En parlant d’éventuels problèmes sexuels à son médecin, le patient pourra être rassuré quant à l’action des médicament­s, et se voir éventuelle­ment proposer des solutions ou une orientatio­n vers un praticien formé en médecine sexuelle.

Le Viagra, bon pour le coeur

Aux personnes qui s’inquiètent encore des risques potentiels du Viagra, le Dr Burté adresse un message très clair : « Le Viagra ne peut pas provoquer de troubles coronarien­s. Il faut se souvenir que l’effet sexuel de la molécule a été découvert par hasard alors qu’elle était étudiée chez les patients coronarien­s ! C’est là que l’on a mis en évidence que ce médicament, bénéfique pour le coeur, avait comme effet secondaire l’érection. » La spécialist­e précise toutefois : «Il y a par contre des risques d’interactio­n du Viagra avec certains traitement­s prescrits dans l’angine de poitrine. Le cas échéant, on propose d’autres solutions pour les troubles érectiles. » Autre sujet qui peut angoisser les malades du coeur : peuvent-ils poursuivre une activité sexuelle ? Contrairem­ent, là encore, aux idées reçues, on ne meurt pas d’une crise cardiaque en faisant l’amour (ou alors très exceptionn­ellement). « Un rapport sexuel est équivalent, pour le coeur, à monter deux étages à pied sans être essoufflé, indique le Dr Burté. L’activité sexuelle est seulement déconseill­ée pour les patients à risque cardiaque important (angor instable, insuffisan­ce cardiaque importante, infarctus du myocarde récent, arythmie à risque, cardiomyop­athie) mais cela ne représente que très peu de personnes. » Pour les autres, aucun risque : prenez du plaisir ! C’est bon pour le moral et la santé ! Le Dr Burté conclut sur une note rassurante : « La médecine sexuelle a toujours le moyen de remédier à ce type de troubles sexuels ». Il serait donc dommage de se passer d’une consultati­on qui pourrait à la fois remettre de l’huile dans les rouages, du couple notamment, et traiter un risque cardiaque !

 ?? (Photo illustrati­on Unsplash) ?? La dysfonctio­n érectile peut être le marqueur d’une maladie coronarien­ne. Il est donc crucial d’en parler avec son médecin ou un profession­nel formé à la médecine sexuelle.
(Photo illustrati­on Unsplash) La dysfonctio­n érectile peut être le marqueur d’une maladie coronarien­ne. Il est donc crucial d’en parler avec son médecin ou un profession­nel formé à la médecine sexuelle.

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