Var-Matin (Grand Toulon)

Soulagés, pas sauvés

- de JACQUES GANTIÉ

« Français, vous pourrez partir en vacances… en France cet été. » Sortant de sa cassette magique  milliards d’euros de finances publiques à destinatio­n du tourisme, de l’hôtellerie et de la restaurati­on, c’est à peu près le message adressé hier par Édouard Philippe. Courage, partons !... On y songe mais on finissait par ne plus y croire, maîtrisant mal le calcul des distances « à vol d’oiseau », ignorant l’âge du conducteur et l’humeur du virus embusqué sur le parcours. Un peu de soleil et des hôtels et restaurant­s enfin ouverts, voilà une bonne nouvelle mais à prendre avec mille précaution­s. Non qu’on mégote sur les milliards, mais parce qu’on n’est guère plus rassuré par le « Faites comme cela » du gouverneme­nt que par le vague « Laissez-nous faire » de certains profession­nels. Ainsi dans l’acte, vital, culturel, de passer à table, l’un des plus essentiels que l’on connaisse, notamment sur la Côte d’Azur, experte en art de vivre. On ignore encore le détail des mesures imposées aux profession­nels mais si le menu n’est pas affiché, on en devine la teneur. Certains seront-ils condamnés pour une insuffisan­ce de mètres carrés ?

Selon ce cruel paradoxe : la distanciat­ion sociale devenue primordial­e dans un lieu dédié au rapprochem­ent, au partage et à l’instant festif. Voilà une donnée inédite dont dépend la survie d’adresses de valeur et de milliers d’emplois. On connaît enfin la question, lancinante : comment se comportera le client ?

refermée la parenthèse des plats à emporter, on l’exigera d’un établissem­ent, quel qu’il soit, où qu’il soit, pour s’y sentir en sécurité, mieux, en confiance. Se rendre au resto, non à l’hosto. Alors, bienvenue sur nos côtes et dans nos campagnes, du moment que clients et profession­nels, soulagés mais pas sauvés, sauront partager les mêmes actes citoyens. Dans ce contexte, la Côte d’Azur, au bleu naturel et au vert tendre sur la carte des régions, a les atouts pour préserver l’essentiel. Diversité, culture, patrimoine, lumières et paysages, terrasses, tables d’artisans, haute gastronomi­e… L’espoir s’esquisse, même a minima, dans un contexte économique terrifiant dont l’addition sera présentée plus tard. Mais pour l’instant, s’il vous plaît, partez ! On vous attend.

« Cruel paradoxe : la distanciat­ion devenue primordial­e dans un lieu dédié au rapprochem­ent, au partage et à l’instant festif. »

Rien n’est garanti mais on n’a pas attendu l’invitation d’hier pour l’imaginer. Ni rejet ni ruée mais un retour sous conditions, la première étant la rigueur. Ayant épuisé tous les plaisirs du cuisiner chez soi – étrange sensation d’avoir la bouche pleine et la peur au ventre – et une fois

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