Qui est le forcené du musée archéologique ?
Le 23 octobre, un homme s’enferme dans le bâtiment et soulève un vent de panique. S’agit-il d’un déséquilibré ? D’un radicalisé ? À cinq semaines du procès, on en sait enfin davantage
Un homme jeune, entre 25 et 30 ans, grand et mince. » Au soir du 23 octobre, c’est à peu près tout ce qu’on sait de l’individu qui s’est introduit au musée archéologique de Saint-Raphaël, avant d’en être délogé par la police. Son identité ? Inconnue. Ses motivations ? Mystérieuses. Certains détails sèment le trouble. L’intrus a tracé sur les murs des mots en langue arabe et «en lettres rouges ». Il n’a pas pris d’otage, ne semble pas être armé, mais il lance des pierres en direction des membres du Raid. Un déséquilibré ? Ou un radicalisé ? À cinq semaines de l’ouverture de son procès à Draguignan (1), la personnalité de cet étrange personnage se dessine enfin.
Des mots qui trahissent
Sa véritable identité a été l’élément le plus difficile à établir. Lors de son interpellation, le garçon déclare s’appeler «AladinZ.» Il prétend être né « le 10 octobre 2001 à Madoise ». Ses empreintes digitales renvoient à… quatre identités fichées différentes. Dont deux déjà connues pour des faits d’exhibition sexuelle. Il faut l’intervention d’un expert traducteur pour dénouer la situation. Interrogé en arabe pendant sa détention, le suspect répond en français. Mais, à la fin de l’entretien, il lâche quelques mots dans un dialecte tunisien. L’interprète note qu’une ville, en Tunisie, porte le nom de Mahdia. Ses habitants sont nommés les Madhouas. Un rapport avec « Madoise », le pays imaginaire mentionné devant les policiers ?
L’homme nie catégoriquement venir d’Afrique du Nord. Mais le consulat de Tunisie reconnaît l’un de ses ressortissants : Alaa Ben Jalel B.S.T., né en 1996 à Tunis.
Un exemplaire du Coran sur la borne d’accueil
Les motivations de cet homme, aujourd’hui encore, demeurent floues. Dans l’enceinte du musée, où deux amphores ont été brisées, les fonctionnaires découvrent un cutter posé sur une chaise. Un exemplaire du Coran est retrouvé sur une borne d’accueil, ainsi qu’une feuille extraite du livre sacré de l’Islam glissée dans le pantalon. Cela ne fait pas du suspect un islamiste. Les mots tracés sur les parois du bâtiment signifient simplement « Dieu est grand » –ce qui ne peut être considéré comme une apologie du terrorisme. L’attitude du prévenu, par ailleurs, suggère une certaine confusion mentale. Dès le début de sa garde à vue, il se met en caleçon, lèche la porte et les murs, se masturbe, urine sur les portes de sa cellule et tente de briser ses menottes avec ses dents. Les médecins diagnostiquent un « syndrome dissociatif avec propos désorganisés » et une « décompensation psychiatrique ». L’expertise réalisée après son incarcération, le 26 octobre, ne relève cependant aucune déficience intellectuelle. Au moment des faits, le discernement du suspect était « altéré » mais non « aboli ». À ce titre, il est jugé responsable de ses actes. Alaa Ben Jalel B.S.T., décrit comme un « marginal, désocialisé, sans travail régulier ni déclaré », devra répondre devant le tribunal du délit de dégradation ou détérioration volontaire du bien d’autrui. Il encourt jusqu’à deux ans de prison et 7 500 euros d’amende. 1. Le procès doit s’ouvrir le 23 juin à 13 h 30 au tribunal correctionnel de Draguignan.