Aéroport de Nice : qui sont ces « oubliés de l’État ? »
Sous-traitants, commerces, loueurs, etc. : plus de 6 000 emplois sont directement menacés. Parce que leur éco-dépendance au tourisme n’est pas (encore) officiellement reconnue
Avec ses 14 millions de passagers par an, en temps normal, l’aéroport Nice Côte d’Azur est en termes de trafic commercial, le deuxième de France. Mais il a aussi - et on l’oublie souvent - une empreinte économique forte dans la région, avec plus de 6 000 emplois directs (hors saisonniers), si l’on tient compte des sous-traitants, des commerces implantés dans les terminaux, des loueurs de voitures, des sociétés de sécurité ou de nettoyage, etc.
Une ville dans la ville
« Une véritable ville dans la ville », selon Céline Montella, agent d’escale et déléguée syndicale (CGT) chez Aviapartner (société spécialisée dans les services aéroportuaires d’assistance, qui compte 3 000 collaborateurs en France, dont 400 déployés sur la seule plateforme niçoise). Mais une ville aujourd’hui devenue fantôme, et surtout « sous tension », depuis que la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a annoncé que l’état, à partir du 1er juin, allait progressivement réduire la voilure dans le financement de l’activité partielle. Et donc demander aux entreprises qui y ont recours de mettre la main à la poche, « dans des proportions raisonnables ». Mais une refonte du dispositif qui ne concerne pas la filière du tourisme, “protégée” par un plan de relance ministériel. « Du coup, aujourd’hui, nous avons l’impression d’être les oubliés de l’État, se lamenteCéline Montella. Le tourisme est une priorité, c’est entendu, mais tout comme les bars, les compagnies aériennes et les restaurants, nous aussi, on en dépend de façon vitale. » Alors de se faire porte-parole de l’ensemble des salariés concernés, et pour le coup, pas seulement ceux d’Aviapartner. « A priori, on ne rentre pas dans les cases pour ces exceptions faites dans le cadre des mesures d’accompagnement de l’activité partielle. Alors on craint, à court terme, une casse sociale énorme, puisque beaucoup de nos entreprises - et pour être en relation constante avec ma direction, je sais de quoi je parle - n’auront pas la trésorerie suffisante pour affronter les mois à venir. Ça risque d’être l’hécatombe… »
Sortir du flou
Avec un T1 toujours fermé, et seulement une poignée de vols à traiter au quotidien (« actuellement, seulement 20 sont prévus en juin et on n’a aucune visibilité sur l’avenir… »), l’horizon s’est donc bien plus qu’assombri. « Nos entreprises, déjà bien fragilisées, ne pourront pas supporter ce poids financier supplémentaire et seront donc forcément contraintes aux licenciements. » Alors de n’avoir plus qu’à espérer qu’Edouard Philippe, à un moment ou un autre, « lève le flou en prenant en compte notre situation particulière. Et nous permette de tenir encore un peu. Parce qu’il y aura une reprise, c’est clair, mais qu’on a encore besoin d’un peu de temps pour s’y préparer… »