L’enquête parallèle de l’Azuréen Sébastien Rogge qui « a tout perdu »
Parce que ces clients avaient mis toute leur confiance en lui, nombre de propriétaires de ces maisons fantômes de Détroit s’interrogent sur son rôle dans cette vaste escroquerie. Avant qu’il ne se mette en silence radio total, Paul De Bastos, dans les colonnes de Mediapart ,a tenté de lui faire porter le chapeau. À 48 ans, Sébastien Rogge, dans les bureaux déserts d’Antom Patrimoine, est au plus mal. « Tout semblait parfaitement sécurisé. J’ai plongé. Aujourd’hui, je suis mort professionnellement. J’ai tout perdu. Je ne me relèverai pas. Je maudis ma naïveté et surtout ses conséquences sur la confiance que mes clients avaient mise en moi et que, d’une certaine manière, j’ai trahie. Ça me tue. » Me Massimo Bianchi, l’avocat marseillais de l’ancien patron d’Antom Patrimoine, confirme : «Ilyaeusans doute de la légèreté, mais ça ne fait pas de lui un coupable. Aujourd’hui, c’est un homme détruit. »
« Une riposte judiciaire majeure aux États-Unis »
Pour autant, malgré l’accablement, les regrets qui le hantent, il tente désespérément de comprendre. Son avocat a déposé une plainte contre Paul De Bastos, tout comme l’a fait d’ailleurs Jean-Pierre Sicre, son confrère bordelais. « Au-delà de la plainte, je veux absolument récupérer l’argent qui a été volé à mes amis. » Telle est son unique obsession. « Nous sommes en train de lancer une riposte judiciaire majeure aux ÉtatsUnis. C’est là-bas et pas en France que la solution judiciaire à cette escroquerie se trouve. Nous avons mandaté un cabinet d’avocats du Michigan pour geler les avoirs de Paul De Bastos, c’est en cours. »
Mais Sébastien Rogge cherche surtout à comprendre pour mieux riposter. L’enquête, qu’il mène sur ses fonds propres, lui a déjà permis d’élucider l’énigme des actes de propriété : « Clairement, tous les clients vous le confirmeront, D3 Invest leur adressait un acte de propriété, validé par son épouse… en tant que public notary [notaire public, ndlr], mais surtout par le service d’urbanisme de la Ville qui y avait apposé son cachet officiel. C’est incompréhensible. »
La poursuite du combat, coûte que coûte
À force d’investigations, Sébastien Rogge a ces derniers jours découvert le pot aux roses. « Après chaque transaction, Paul De Bastos, via sa compagne, intervenait auprès du service cadastral de Détroit, arguant que l’acte était entaché d’une simple erreur d’écriture, le plus souvent – fatalement – sur l’adresse du bien. Et nous avons découvert que ces requêtes ont été systématiquement reçues par le service du cadastre qui annulait les actes initiaux. » Plus d’acte, donc plus de titre de propriété. Naturellement personne, parmi les acquéreurs ici en France, n’en était informé. Ils se retrouvaient donc, sans le savoir, propriétaires de rien. Quitte à perdre tout ce qui lui reste, Sébastien Rogge entend poursuivre ce combat pour son honneur.