UNE VAGUE DE LIBERTÉ
Ce nouveau seuil symbolique est dû à une forte accélération, avec un doublement du nombre de malades en un mois. Mais avec des contrastes très forts selon les régions du globe
La planète a franchi hier le cap des cinq millions de cas recensés avec une situation contrastée entre la Chine, qui s’apprête à déclarer victoire sur le virus, l’Europe, où la baisse semble bien enclenchée mais qui scrute de près les effets du déconfinement, et le continent américain, où le bilan ne cesse de s’alourdir. En un mois, le nombre de malades officiellement diagnostiqués a doublé pour atteindre au moins 5,03 millions, parmi lesquels 329 186 décès, selon les chiffres de l’université américaine Johns-Hopkins hier. Un bilan de toute façon sans doute largement sous-évalué du fait des limites en matière de tests selon les pays, mais qui met néanmoins en évidence une accélération au niveau mondial, avec des augmentations particulièrement élevées ces dix derniers jours.
La Chine célèbre sa « victoire »
En Chine, les 3 000 députés de l’Assemblée nationale populaire (ANP) sont réunis depuis hier pour la grand-messe annuelle du régime communiste. Elle «devrait donner l’occasion [au président] Xi Jinping de proclamer la victoire totale dans la ‘‘guerre populaire” contre le virus », prévoit la politologue Diana Fu, de l’université de Toronto, même si le pays redoute une deuxième vague après des résurgences dans certains endroits ces dernières semaines. Restée de marbre après les propos de Donald Trump qui l’a accusée d’être responsable d’une « tuerie de masse mondiale », la Chine a en revanche menacé de « mesures de rétorsion » si le Congrès américain adoptait des sanctions pour son rôle supposé dans la propagation de l’épidémie.
L’Europe entre deux eaux
Continent le plus touché avec près de 2 millions de cas, dont plus de 170 000 mortels, l’Europe poursuit de son côté sur la voie d’une très lente normalisation. Après deux mois de confinement, Chypre a ainsi rouvert hier ses cafés, restaurants en plein air et salons de coiffure, ainsi que des écoles. Les plages doivent rouvrir aujourd’hui – pour les baignades, pas pour le bronzage –, mais aéroports et hôtels restent fermés. Mais sur le Vieux Continent aussi, l’assouplissement progressif des restrictions, qui s’est accéléré dans de nombreux pays (Royaume-Uni excepté) depuis une semaine, s’accompagne de la crainte d’une recrudescence de l’épidémie. Soleil printanier aidant, le retour de l’apéro en terrasse en Italie a alarmé les autorités. « Ce n’est pas le moment pour la fête ou la movida ! » , a mis en garde le Premier ministre, Giuseppe Conte. En Espagne, le port du masque dès six ans est désormais obligatoire dans tous les lieux publics lorsqu’il n’est pas possible de garder ses distances.
Aux États-Unis, l’économie à tout prix
Sur le continent américain enfin, l’épidémie continue à faire des ravages aux États-Unis, pays le plus touché au monde en nombre de contaminations (1,55 million de cas) et de décès (plus de 93 500). Et si certaines régions – notamment l’État de New York, en première ligne depuis l’arrivée du Covid-19 sur le sol américain – connaissent un ralentissement, celui-ci pourrait n’être que temporaire, les restrictions ayant été très variables selon les endroits et ayant déjà commencé à être levées. Un mouvement encouragé au niveau national : très critiqué pour sa gestion de la crise, Donald Trump veut coûte que coûte redémarrer l’économie. Quelque 2,43 millions de nouvelles demandes d’allocation-chômage ont été enregistrées la semaine dernière, pour un total de 38,6 millions depuis la mi-mars. Et l’élection présidentielle, qui doit se tenir en novembre, se rapproche.
Forte accélération en Amérique latine
Mais la région du monde où la situation empire le plus vite est désormais l’Amérique latine et les Caraïbes, avec près de 30 000 nouveaux cas recensés mercredi, contre un peu plus de 12 000 aux États-Unis et au Canada combinés, et 10 600 en Europe. Le Brésil est en première ligne, avec un bilan quotidien qui vient de grimper jusqu’à 1 179 décès. Mais le président d’extrême droite Jair Bolsonaro continue de minimiser la dangerosité du virus et de critiquer le confinement. Le pays comptait hier 291 579 cas au total un chiffre qui a doublé en neuf jours. La crise s’aggrave aussi au Pérou (104 020 cas), au Mexique (56 594 cas) et au Chili (53 617). Et pourrait s’avérer explosive, dans une région où les inégalités sociales sont parmi les plus fortes au monde : l’armée s’est ainsi déployée dans des quartiers pauvres de Santiago du Chili, où la population s’est affrontée à la police pour réclamer des aides.