« On ne peut pas se contenter de pointer la fatalité »
Éric Ciotti, rapporteur de la commission d’enquête sur la gestion de l’épidémie
La commission d’enquête sur « l’impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l’épidémie de coronavirus », qui succède à ce qui n’était jusqu’ici qu’une simple mission d’information, a été installée hier à l’Assemblée nationale. Pendant six mois, elle passera au crible la stratégie sanitaire du gouvernement. C’est la présidente LREM de la commission des Affaires sociales, Brigitte Bourguignon, qui la dirige, le député LR des Alpes-Maritimes Éric Ciotti en étant le rapporteur.
Que répondez-vous à ceux qui disent que chacun a bien perçu ce qui a dysfonctionné et se demandent à quoi va servir une commission d’enquête ?
Les Français ont droit à la vérité sur ce qui a conduit à un désastre sanitaire dans notre pays : 29 000 morts, une chute économique inédite avec une destruction annoncée de 11 % de la richesse nationale et des millions de chômeurs à la clé. Cette situation dramatique exige qu’on fasse toute la lumière sur les failles, voire les fautes, qui en sont à l’origine. On ne peut pas sortir de cette crise en se contentant de pointer la fatalité. Nous avons besoin de réponses, non pour instruire un procès, mais pour faire en sorte que si une situation analogue venait à se reproduire, notre pays soit mieux armé pour y faire face. Par rapport au sentiment que nous avions de disposer du meilleur système de santé au monde, nous avons découvert, à chaque étape de la crise, que nous n’étions à l’abri de rien : défaut de protections pour nos soignants, pénurie de masques, absence de tests, capacités hospitalières trop faibles en réanimation, gestion calamiteuse des Ehpad, liberté de prescription des médecins de ville entravée... Toutes ces questions appellent des réponses transparentes.
Quelles sont les investigations que va mener la commission ?
Il faut, par exemple, éclaircir pourquoi nous sommes passés d’un milliard 700 millions de masques en 2010 à 100 millions au début de la crise. Ensuite, est-ce que si nous avions eu des tests, des masques et les capacités hospitalières suffisantes, nous aurions pu éviter le confinement ? Je ne le remets pas en cause puisque nous n’avions que cet outil. Mais il a mis notre économie à genoux. Si, à l’automne, nous sommes confrontés à une seconde vague ou à un autre virus, faudra-t-il réitérer le confinement ou gérer autrement ? Cette commission a, au fond, pour mission de nous donner les capacités de gérer une crise similaire de manière différente, en évitant de rééditer le même fiasco et le même degré d’impréparation, au-delà de savoir qui a été responsable de quoi.
Le Sénat aura aussi sa commission d’enquête. Ça fait beaucoup…
Les deux chambres ont leur identité, c’est le principe même du bicamérisme. Il est assez classique que les deux assemblées se saisissent d’un sujet aussi essentiel. J’espère qu’on travaillera de façon très complémentaire.