Reprise compliquée des chantiers dans le BTP
Certaines entreprises risquent de vivre de graves difficultés, voire le dépôt de bilan, en raison des multiples complications liées au Covid-19 sur les chantiers
Madame le président de la fédération du BTP des Alpes-Maritimes, c’est ainsi que Laure Carladous nomme sa fonction. Elle y tient, comme elle tient à faire remarquer que les entreprises du bâtiment et des travaux publics ont été bien moins soutenues que d’autres. « On ne nous a pas proposé d’exonération de certaines charges ou du paiement des surcoûts liés au Covid », dénonce-t-elle. Même le chômage partiel a été obtenu après les autres. Les surcoûts sont ceux dus aux règles sanitaires sur les chantiers, qui imposent la distanciation entre les ouvriers, et donc des vestiaires et des réfectoires plus grands ou à utiliser à tour de rôle, le port du masque à l’extérieur, la mise à disposition de gel pour se nettoyer les mains toutes les deux heures, etc.
Une heure de travail perdue chaque jour
Autant de contraintes qui font perdre une heure de travail par jour. Une heure précieuse car elle fait prendre du retard sur le chantier « avec les risques de pénalités en bout de course, précise Laure Carladous. Toutes ces contraines ont un vrai coût pour l’entreprise. » Un coût qu’elle voudrait voir partager entre les entreprises, l’État, les fournisseurs et les clients. « Les entreprises du BTP ont une marge de 2 % dans leur bilan. Avec 10 à 15 % de surcoût, on ne va pas aller loin. »
Les chantiers reprennent peu à peu depuis la mi-avril. Cela n’empêche pas Laure Carladous de roudouter « la deuxième salve »du Covid-19, celle qui pourrait projeter des entreprises dans de grandes difficultés, voire vers le dépôt de bilan. « À cause de ces surcoûts, certains chantiers ne sortiront pas », indique-t-elle, entre autres. Même inquiétude dans le Var. « Dans les travaux publics, on estime qu’à la mi-juin, on aura 100 % de reprise. C’est plus complexe dans le bâtiment. Il y a plus de corps de métiers et de coactivités : plombiers, plaquistes, peintres, carreleurs, etc., explique Cyril Bolliet, secrétaire général de la Fédération du BTP du Var. Il y a le problème des sites occupés. Par exemple, dans des logements sociaux occupés, il faut un protocole. Combinaisons, surchaussures, masques, gants sont obligatoires. Le particulier peut refuser une intervention chez lui, surtout s’il est à risque. Aujourd’hui, 80 % des chantiers du bâtiment ont repris. »
« Se préparer au pire »
Dans l’entourage de Jean-Jacques Castillon, président du BTP83, on redoute le retard de plus de deux mois dans l’instruction des permis : « Les entreprises risquent de se retrouver avec un trou si rien n’est fait. » Mais la possible prise en charge d’une partie des surcoûts par le conseil départemental du Var et la Métropole Toulon-Provence-Méditerranée sur certaines opérations est saluée. Les discussions sont en cours. « Le pire n’est jamais sûr, mais il faut s’y préparer », confie Cyril Bolliet. Les dépôts de bilan en font partie.