La méga-étude sur la chloroquine finalement impossible à vérifier
Le Pr Didier Raoult l’avait qualifiée de « foireuse » (nos éditions du 26 mai) car basée sur « des données dont on ne connaît pas la qualité » , et sur ce point, le polémique infectiologue marseillais avait finalement raison. Trois des quatre auteurs de l’étude controversée publiée dans The Lancet sur l’utilisation de l’hydroxychloroquine ont demandé la rétractation de l’article, a annoncé jeudi soir la prestigieuse revue médicale britannique. « Nous ne pouvons plus nous porter garant de la véracité des sources des données primaires », écrivent-ils, mettant en cause le refus de la société les ayant collectées – qui est dirigée par le quatrième auteur – de donner accès à la base de données.
Retentissement mondial
Publiée le 22 mai, cette étude – qui venait après plusieurs autres allant dans le même sens –, concluait que l’hydroxychloroquine n’est pas bénéfique pour les malades hospitalisés, et pouvait même avoir un effet nocif non négligeable (nos éditions du 24 mai). Sa parution avait eu un retentissement mondial et des répercussions spectaculaires, poussant notamment l’OMS à suspendre les essais cliniques concernant ce traitement. Mais finalement, après de nombreuses critiques mettant en cause la méthodologie de l’étude, y compris de la part de scientifiques sceptiques sur l’intérêt de l’hydroxychloroquine, l’OMS a annoncé mercredi la reprise des essais cliniques avec cette molécule. Les critiques mettaient en particulier en cause les données sur lesquelles se fondait l’étude (96 000 patients hospitalisés entre décembre et avril dans 671 hôpitaux sur les six continents), récoltées par la société américaine Surgisphere, dirigée par le quatrième auteur Sapan Desai. « Nous avons lancé une analyse indépendante de Surgisphere avec l’accord de Sapan Desai pour évaluer l’origine des éléments de la base de données, confirmer qu’elle était complète et répliquer les analyses présentées dans l’article », écrivent les trois autres auteurs. Mais Surgisphere ayant refusé de transférer la base de données en raison des accords de confidentialité avec ses clients (les hôpitaux à l’origine des données), les experts missionnés « n’ont pas pu conduire une revue indépendante et nous ont informés de leur retrait du processus d’évaluation par les pairs », ajoutent-ils.