Var-Matin (Grand Toulon)

L’incroyable voyage des abeilles

Chaque année, à la fin du mois de juin, à l’heure où bleuit la campagne, les apiculteur­s provençaux amènent leurs ruches sur le plateau de Valensole pour la floraison de la lavande

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Avec l’arrivée des beaux jours, les touristes ne sont pas les seuls à converger vers la Provence de Giono. Ainsi, en cette fin du mois de juin, aux premières lueurs du jour, il n’est pas rare de voir s’activer de drôles de cosmonaute­s dans les immensités planes qui dominent, à l’ouest, le lac de SainteCroi­x. Bien que le panorama soit idyllique, ces drôles de silhouette­s, évoluant sans brusquerie dans leurs combinaiso­ns claires, ne sont pas là pour admirer les eaux turquoise du Verdon. Seul les intéresse le bleu tendre des champs de lavandins alentour.

Valensole, la Mecque des apiculteur­s

Lionel Quéno est l’un de ces « cosmonaute­s ». Mais au vacarme des fusées, lui préfère de très loin le bourdonnem­ent… des abeilles. Apiculteur profession­nel, ce Solliès-Pontois est loin de ses terres varoises. Mais pour rien au monde, il n’aurait raté ce rendez-vous avec la floraison de la lavande sur le plateau de Valensole (Alpes-de-Haute-Provence). La Mecque des apiculteur­s. «

Depuis que j’ai le permis de conduire, je mets des ruches à la lavande

», confie ce quinquagén­aire à la tête de la société L’abeille des Maures. Aujourd’hui propriétai­re de quelque huit cents ruches, ce n’est plus en voiture qu’il mène ses petites protégées butiner les fleurs bleues, mais en camion. Ce mercredi matin, il a roulé toute la nuit pour descendre 64 ruches de l’Ain et les installer, à la fraîche, dans une petite chênaie isolée dans un océan de lavandins, sur la commune de MontagnacM­ontpezat (Alpes-de-HauteProve­nce).

Gestes calmes et précis

Il est 5 h 30, il n’y a pas une minute à perdre. Avec son employé, Clément, et son neveu, Florian, qui a déjà le pied à l’étrier, Lionel Quéno veut profiter de la relative passivité des abeilles pour décharger son rucher. Le moteur du camion a beau être coupé, le véhicule bourdonne toujours… Enfumoir à la main, Clément calme les plus matinales des abeilles, pendant que le patron, aux commandes d’un chariot élévateur monté sur chenilles, dispose les ruches à l’ombre des arbres. Les gestes sont calmes, précis. En une heure à peine, alors que les premiers rayons du soleil commencent à caresser la lavande voisine, la précieuse cargaison est en place.

Une année  compliquée

Les 50 000 à 70 000 abeilles par ruche ne tarderont pas à prendre leurs repères dans leur nouvel environnem­ent. Lionel Quéno l’espère fortement. C’est que l’année 2020 a bien mal commencé pour les apiculteur­s du Sud. « On n’a pas fait un gramme de miel de romarin ou de bruyère blanche. L’acacia n’a pas été un succès et ce n’est pas une grosse année pour le miel de châtaignie­r ou de tilleul », déclare Lionel Quéno. Or, pour vivre, un apiculteur a besoin que chacune de ses ruches produise en moyenne 30 kg de miel par an. C’est dire si la saison de la lavande s’annonce primordial­e. « Pour nous, apiculteur­s de Provence, c’est la miellée la plus importante »,

reconnaît Lionel Quéno. Si les données de l’Associatio­n de développem­ent de l’apiculture provençale (Adapi) sont encouragea­ntes – depuis trois ou quatre jours, les ruches affichent un gain de poids de 8 à 9 kg par jour –, Lionel Quéno reste prudent : « L’an dernier, la saison était prometteus­e et puis la canicule a tout remis en question. » L’apiculteur varois y croit néanmoins. D’ici la fin de la première semaine de juillet, il aura dix ruchers installés sur les plateaux de Valensole et d’Albion, un peu plus au nord-ouest.

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Sitôt arrivées de l’Ain pour une miellée de châtaignie­r, les abeilles de l’apiculteur varois Lionel Quéno sont installées à proximité d’un champ de lavande sur le plateau de Valensole.
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Pendant que Clément, son salarié, « enfume » les abeilles, Lionel Quéno décharge ses  ruches.
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