Var-Matin (Grand Toulon)

Toutes les nuances de vert de la Provence

- TEXTE ET PHOTOS AMANDINE ROUSSEL

Le paradis, ça se mérite ! Celui de Marcel Pagnol encore plus. Pour atteindre les belles collines de son enfance, il faut marcher. Ça grimpe, c’est rocailleux, il fait chaud, très chaud. C’est sans doute le prix à payer pour se sentir aussi libre que le petit Marcel et revivre pas à pas ses fameuses vacances de l’été 1904 tellement bien décrites dans La Gloire de mon père et Le Château de ma mère. L’écrivain passait alors tout son temps dans la garrigue où un vent de liberté et d’aventure le poussait à des escapades de plus en plus approfondi­es.

Balades commentées

L’office de tourisme du Pays d’Aubagne et de l’Étoile propose toutes une série de balades commentées autour de Pagnol. Les différents circuits permettent aux randonneur­s de découvrir des lieux de tournage (de la grotte de Manon des sources, au faux village de Regain), des souvenirs d’enfances, l’ancien village de La Treille... Nous avons fait le choix de sortir des sentiers battus et de nous perdre dans la garrigue comme l’avait fait au début du XXe siècle le jeune Marcel. Une terre d’insoucianc­e, cadre d’un voyage initiatiqu­e. Voiture déposée à La Treille, baskets aux pieds et chapeau vissé sur la tête, nous ne revenons pas seulement sur les pas de l’enfance de l’écrivain mais aussi sur la nôtre, bercée par ses deux principaux ouvrages en prose. Ces collines, au travers des mots délicieux de l’auteur, nous les avons déjà admirées, nous les avons déjà senties.

Le Garlaban au coeur

« Je suis né dans la ville d’Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers. Garlaban, c’est une énorme tour de roches bleues, plantée au bord du plan de l’Aigle, cet immense plateau rocheux qui domine la verte vallée de l’Huveaune », écrivait-il dans les premières pages de son récit. Si les randonneur­s chevronnés n’hésiteront pas à rejoindre le sommet du Garlaban (713 mètres d’altitude), nous nous sommes contentés de prendre la direction du vallon de Passe-Temps, là même où Marcel « sentit naître un amour qui devait durer toute [sa] vie » pour ce paysage si caractéris­tique. En ligne de mire, le col d’Aubignane. Moins ambitieux, mais le panorama n’en est pas moins superbe.

On distingue au loin la Grande Bleue. La ville de Marseille se dessine également. Son urbanisati­on très concentrée et même son stade Vélodrome offrent un contraste étonnant avec le paysage naturel que nous foulons. Et c’est d’ailleurs lorsque l’on tourne le dos à la vue et à la ville que l’on se plonge tout à fait dans l’univers de Pagnol. On découvre sur la gauche des barres de Saint-Esprit, la colline allongée dont l’écrivain soulignait « la forme d’un vaisseau de guerre à trois ponts ».

Les sens en éveil

Là où la nature est plus dense, les ronces commencent à produire des mûres qui bientôt ne demanderon­t qu’à être cueillies par un randonneur gourmand. Plus loin, la végétation aussi foisonnant­e que sèche colore la terre aride de toutes les nuances de vert. Et que dire des odeurs... ça sent tout simplement la Provence. Des pins du début de balade jusqu’au romarin et au thym du sommet, les effluves chatouille­nt le nez. À tout moment, on s’attend à croiser Joseph le paternel et l’oncle Jules en pleine partie de chasse aux bartavelle­s. Ou encore à tomber nez à nez avec Lili des Bellons, le fidèle ami, l’enfant des collines qui apprit à Marcel à piéger les oiseaux...

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