Var-Matin (Grand Toulon)

« De belles choses à faire »

Juillet marque la reprise des compétitio­ns européenne­s. Le Varois Alexander Levy, ambassadeu­r du Riviera golf de Barbossi, a profité de cette pause forcée pour remettre tout à plat

- FABIEN PIGALLE

Il a perdu pas mal de kilos, mais pas son sourire. Alexander Levy, autrefois n° français, nous a reçus dans son golf Riviera Barbossi à Mandelieu pour évoquer la suite de sa saison. Le Varois, qui a connu des performanc­es en dents de scie, a bousculé énormément de choses pour revenir sur le devant de la scène. Sans faire de bruit, El Toro est prêt à en découdre.

Comment avez-vous vécu cette période de confinemen­t ? Malgré la tristesse de l’événement, j’ai assez bien vécu la chose dans le sens où ça m’a permis de me remettre en question et de faire certains choix importants. J’en ressors grandi et je ne pense pas que, sans cet arrêt, j’aurais pu y voir aussi clair. Attention, ça reste un moment tragique pour nous tous. Mais moi, ça m’a remis les idées en place. Qu’avez-vous changé ? Je me suis attardé sur l’aspect psychologi­que : la vie en général, sur ma motivation, le golf etc. Je trouvais que je n’en faisais pas assez. Je me suis trompé sur pas mal de choses. On vit de notre passion, on gagne de l’argent. C’est quelque chose de positif, mais ça peut être aussi à double tranchant si on se perd un peu en route. Parce que l’échec entraîne une frustratio­n encore plus grande. Mais, en vrai, il n’y a pas d’échecs, ce sont juste des expérience­s. La notion de réussite et d’échec dans le golf est aussi très relative... Évidemment. Je suis très bien entouré et c’est une chance. Je me suis toujours donné des objectifs et, à partir de là, j’ai mis les moyens pour y arriver. J’ai gagné  fois sur le Tour. Dès qu’on ne gagne plus, on est rapidement jugé. Mais le golf est plus subtil que ça. Je pense d’ailleurs être sincèremen­t un meilleur golfeur aujourd’hui qu’en  quand j’ai gagné. Je fais tout mieux. Mais il y a cet aspect psychologi­que très important dans ce sport qu’on a tendance à oublier. Pour gagner, il faut une part de chance également. Tout ça pour dire qu’on peut faire de très belles saisons sans forcément gagner. C’est une nouvelle façon de voir le golf ? Oui, il faut mettre les choses en perspectiv­e. Plus on joue de gros tournois, plus l’adversité est élevée et donc ce n’est pas évident de l’emporter. Mais sur le plan du golf, techniquem­ent parlant, je peux gagner n’importe quel tournoi. Je sais ce dont je suis capable. Je peux gagner un championna­t du monde, PGA Tour ou un Majeur. Quand on annonce ça, en général, on est attendu au tournant... Ne craignezvo­us pas de vous rajouter de la pression ? Je m’en fous parce que je le pense. Sinon je ne le dirais pas. Ce n’est pas parce que je le dis que je vais le faire forcément. Mais si tu te lèves le matin et que tu ne crois pas en toi et tes capacités, c’est même pas la peine. Les gens pourront dire ce qu’ils veulent : je sais ce que je fais et je sais ce que je donne pour y arriver. Je ne vole rien à personne, je ne dois rien à personne. J’ai donc le droit de le dire.

La saison a repris mais ça restera une saison blanche quoiqu’il arrive. Est-ce un soulagemen­t pour vous dans cette période de remise en question ? Pas un soulagemen­t, mais disons plus une année bonus. Car si on joue bien on peut aller très haut. On peut travailler sur des choses qui s’effectuent en général à l’intersaiso­n sur une plus courte période. On n’a pas la pression de garder ou non sa place dans l’élite et donc son métier l’année d’après. Ce n’est pas négligeabl­e. Dans quel état d’esprit aviez-vous attaqué la saison avant le confinemen­t ? Je n’étais pas du tout dans le même état d’esprit. J’avais cerné certaines choses... Mais d’avoir été livré à moimême, sans le rythme d’une saison de golf, ça m’a fait un bien fou. J’étais chez mes parents à La Seyne-sur-Mer, c’était parfait. Votre calendrier ? Ça va dépendre des règles en vigueur et des contrainte­s sanitaires. Sur les six tournois de reprise, je compte jouer le premier et le deuxième en Angleterre ( et  juillet), le quatrième et le cinquième, voire le sixième. Il y a de belles choses à faire. J’ai retrouvé la motivation je le sens. Pourquoi avait-elle disparu ? C’était global. J’avais axé ma vie sur d’autres priorités (sourire), qui n’étaient pas les meilleures. Comme quoi ? Vous voyez bien comment est le monde aujourd’hui... On prend facilement goût à certaines choses qui ne vous représente­nt pas. Je pense à la dictature des réseaux sociaux. Il y a quand même des gens qui gagnent leur vie avec des Likes et des followers. Je ne critique pas, chacun ses envies, mais moi je me suis fait aspirer par ce monde-là et je me suis perdu à vivre un peu via le regard des autres, le superficie­l. Quand vous êtes là-dedans, peu importe qui tente de vous faire prendre conscience du mauvais chemin emprunté, si ça ne vient pas de vous, c’est un coup d’épée dans l’eau. Je ne regrette pas car si j’ai pu vivre ça, c’est aussi grâce à mes succès. Mais il faut savoir en sortir. Aujourd’hui, ça ne m’attire plus du tout. Là, c’est bon, je suis revenu à la réalité. Je suis revenu à mes priorités : le golf. Quel est l’objectif aujourd’hui ? Sortir le meilleur de ce que j’ai. J’ai déjà fait de bonnes choses tout en ayant une grosse marge de progressio­n. Aujourd’hui, je dois exploiter ça. Il y a deux styles de joueurs. Certains, qui peuvent se contenter d’être e mondial et gagner très bien leur vie. Et d’autres, prêt à perdre leur droit de jeu et à se mettre en difficulté, à en chier, pour aller encore plus haut. Moi, je fais partie de cette deuxième catégorie. Je suis prêt à prendre le risque. Ça ne me fait pas peur. On est toujours jugé par les autres. La critique fait partie de la vie. Mais pour aller au très haut niveau, il faut aussi quelque part accepter ça. Il faut toujours faire son autocritiq­ue également. Il faut digérer ça.

Je suis revenu à mes priorités : le golf ”

Je me suis perdu à vivre un peu via le regard des autres... ”

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(Photo @frames.insta) Alexander Levy s’est entraîné pendant le confinemen­t chez ses parents à la Seyne-sur-Mer.

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