Var-Matin (Grand Toulon)

Sa curiosité est un joli défaut Avec Christophe, on partageait énormément”

Le musicien poursuit son parcours atypique avec Environs. Un disque blues hétéroclit­e sur lequel il invite le chanteur Bertrand Belin, la contrebass­iste jazz Sarah Murcia ou le regretté Christophe.

- amaurette@nicematin.fr PAR AMÉLIE MAURETTE

Toujours un peu à part, Rodolphe Burger continue de tailler la route. L’ancien prof de philo devenu auteur-compositeu­r et fondateur du groupe rock Kat Onoma dans les années 1980 livre Environs, son huitième album solo. Un disque fouillé, polymorphe, qu’on a envie de qualifier de blues, de rock mais qui, à l’image des quelques reprises qu’il intègre – un lied de Schubert aussi bien qu’un reggae de The Jamaicans –, ouvre les oreilles à autre chose. Autre chose que les sons calibrés qui peuplent les radios, que les traditionn­els couplet-refrain-coupletpon­t pourtant si efficaces. C’est un peu ardu, comme toujours avec Rodolphe Burger, presque expériment­al, mais ça participe à l’extension du domaine de la chanson et ça ne peut pas faire de mal. « C’est vrai, j’ai envie d’élargir au maximum la page sur laquelle on écrit, l’oreille aussi, reconnaît l’Alsacien. Mais c’est un souci quand j’écris un disque ! J’ai envie de faire à la fois un album solo, minimal, et puis très arrangé, avec plein de musiciens… Il faut trouver une intersecti­on musicale et, dans ces cas-là, il faut bien dire que le blues est presque un langage universel. »

Difficile à caser

Rodolphe Burger embarque donc son auditeur au fil de ses envies, de ses influences, de sa curiosité permanente. « Le rock d’abord, première chose que j’ai écouté à la fin des années 1960, une espèce d’âge d’or et puis vite la musique noire, Ray Charles, James Brown. Certaines formes de jazz libre aussi, Ornette Coleman, des gens comme ça… Et puis le blues évidemment, sous-jacent. Puis du blues découle la musique africaine, puis la musique répétitive, l’avant-garde américaine… Ça passe par tous les chemins, tous les chemins sont bons pour la musique », s’enthousias­me celui qui a fondé son propre label, Dernière Bande, pour réaliser des projets parfois difficiles à caser dans un circuit plus classique. « Mon parcours, c’est le contraire d’une carrière. Je ne me suis jamais senti comme un profession­nel de rien. En revanche, j’ai fait de la musique très tôt, au culot, à la naïveté », s’amuse-t-il. De la musique au culot qui a ensuite elle-même trouvé ses amateurs. Comme le chanteur Bertrand Belin, la contrebass­iste jazz Sarah Murcia ou le regretté Christophe, entre autres invités sur ce disque. « Avec Christophe, on partageait énormément, on était fans d’Alan

Vega… Christophe, c’est l’exemple même d’une démarche inattendue, ouverte, partie de la variété vers des chemins de traverse extraordin­aires, même chose que Bashung. C’est pour ça qu’on avait du plaisir à jouer ensemble », souligne Rodolphe Burger qui avait d’ailleurs invité l’interprète d’Aline dans le festival qu’il organise habituelle­ment chaque année dans son Alsace natale. « Avec Bertrand Belin, nos voix se confondent, c’est presque troublant. Je n’ai jamais eu ça avec un autre artiste français, on se comprend, je suis impression­né par sa démarche, son évolution, j’admire le guitariste, le parolier, le showman, l’écrivain maintenant… » Voilà pour les collaborat­ions. Pour le reste, cet Environs, le chanteur l’a construit morceau par morceau, en suivant « son bon plaisir ». «Ily a un côté libre pérégrinat­ion, à partir d’un endroit, le studio où j’enregistre, dans ma vallée alsacienne, une matrice, un petit vaisseau spatial qui décolle et qui fait s’évader. » De l’évasion sans bouger de chez soi, c’est finalement complèteme­nt de saison. Comme ce titre d’ailleurs, forme impérative du verbe « envirer »… « Découvrir ce verbe, que je ne connaissai­s pas, m’a plu. Il signifie tourner sur soi jusqu’à l’étourdisse­ment. J’ai trouvé qu’il correspond­ait bien au disque. Et c’est vrai que cela correspond aussi tout à fait ce moment de confinemen­t et de post-confinemen­t. C’est une coïncidenc­e incroyable, car l’album était fini avant tout ça ! »

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(Photo Ben Pi) « Je ne me suis jamais senti comme un profession­nel de rien. En revanche, j’ai fait de la musique très tôt, au culot, à la naïveté... »
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Environs. Rodolphe Burger. (Dernière Bande/ PIAS)

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