Var-Matin (Grand Toulon)

Isabelle Carré et Irène Jacob l’âme soeurs

Amies à la vie et comme soeurs à la scène, elles ont fait lecture à deux voix de Tendre est la nuit à Valberg pour le Festival des mots. À l’hôtel Aston de Nice, elles ont ri à l’unisson

- ALEXANDRE CARINI acarini@nicematin.fr 1. Irène Jacob a reçu le prix d’interpréta­tion à Cannes pour La Double Vie de Véronique en 1991.

Nous sommes deux soeuuuuurs, jumelles. » Pour un peu, Isabelle Carré et Irène Jacob pourraient reprendre la chansonnet­te de Michel Legrand, telles de nouvelles demoiselle­s de Rochefort. Certes, entre la blonde diaphane au look naturel et la brune à l’accent suisse, la ressemblan­ce n’est pas forcément frappante. Mais au-delà du physique, leur évidente complicité saute aux yeux. Une longue amitié, mêlée d’estime et de respect. Et puis une carrière aussi éclectique pour l’une comme pour l’autre, témoin de leur insatiable curiosité. De leur égale passion pour leur métier. L’une a reçu un César et deux Molières, quand l’autre a reçu un prix d’interpréta­tion à Cannes. Travailleu­ses et douées. Et puis l’écriture de romans, pour exprimer d’une autre façon leur pensée. Et puis toutes deux un frère musicien, avec lequel elles ont chanté. Et puis une double vie (Véronique ?)

(1) de mère et d’actrice, qu’elles parviennen­t à préserver. Et puis, et puis… Avant même de prononcer un mot pour la lecture de Francis Scott Fitzgerald à Valberg, Isabelle et Irène s’étaient déjà (re)trouvées, à l’hôtel Aston de Nice. Sans même avoir besoin de mettre des points sur leurs I.

Cette lecture à deux voix, par amitié ou nécessité ? Isabelle : Par amitié ! Irène a déjà participé au Festival des mots, et elle m’y a incitée. On s’est connues en  sur Résonances, une pièce mise en scène par Irina Brooks, où Irène a également rencontré son mari Jérôme Kircher. C’était un moment charnière de nos vies, on a beaucoup changé depuis, et on a connu des choses très fortes ensemble. Irène est une femme exceptionn­elle, généreuse et discrète, c’est très facile d’être son amie ! Irène : Quand je vois Isabelle, je sais tout de suite que tout ce qu’elle va me dire va me toucher profondéme­nt, c’est aussi ce qu’on attend de l’amitié. On souhaitait depuis longtemps de se retrouver sur scène.

Vous lisez F. Scott Fitzgerald, qui a vécu à Juan-les-Pins. Et vous, votre rapport à la Côte d’Azur ? Isabelle : Ah, c’est beaucoup de souvenirs de jeunesse, l’une de mes premières tournées à Nice en  pour L’École des femmes avec Jacques Weber et Guillaume de Tonquédec. Je logeais à l’Hôtel des anges situé sur la place Masséna, et je suis revenue souvent jouer au grand théâtre. Plus récemment, j’ai découvert un nouvel endroit de cette belle ville au Salon du livre. Irène : Moi, je vais plutôt en Bretagne pour les vacances, mais c’est vrai qu’il y a eu le Festival de Cannes, une vraie fête de cinéma, dans un site exceptionn­el, avec les premiers soleils de mai.

Et la montée de marches ? Isabelle : J’ai un rapport un peu mitigé avec Cannes, où je suis venue présenter La Femme défendue, en . Pour moi, le tapis rouge, c’était un peu trop, il y avait un manque de simplicité qui m’étouffait. Irène : Moi, j’ai dû dormir une semaine après pour récupérer !

Et vos récompense­s, comment les considérez-vous ? Irène : Mon prix, c’était juste un papier à cette époque, mais peu importe, je ne suis pas du genre à faire trôner un trophée dans mon salon. Isabelle : Pareil, j’ai un rapport un peu distant avec les Césars ou les Molières. Ce sont des encouragem­ents, la cerise sur le gâteau, mais ce n’est pas le gâteau.

Films d’auteur ou plus populaires, l’éclectisme de vos carrières est un choix ? Irène : Moi, je ne suis pas du tout issue d’une famille de cinéma et quand je suis sortie de l’école, j’ai fait les films que j’aimais. Après, on essaie de suivre une boussole pour indiquer une direction, mais on peut aussi prendre des chemins détournés [elle a même joué dans US Marshals, blockbuste­r avec Wesley Snipes et Tommy Lee Jones, ndlr] Isabelle : Ça se fait en fonction d’une rencontre, d’un scénario, mais il n’y a pas de calcul ni plan de carrière. Avec Irène, nous sommes un peu des électrons libres, au gré de nos envies.

La lecture, plaisir particulie­r ? Isabelle : Dans la lecture, j’aime aussi l’idée de donner envie de lire un livre. Pourtant, je ne lis pas très bien. Alors que je n’ai pas le trac pour jouer, là je ripe, mais j’y vais quand même pour le plaisir du partage. Irène : Moi, j’ai beaucoup lu pour mes enfants, et j’aime bien prendre les gens par l’oreille !

L’écriture de vos romans ? Isabelle : Je ne me sens pas du tout romancière, mais j’ai beaucoup écrit plus jeune, jusqu’à  ans et, à un moment, j’ai senti l’urgence de m’y remettre. Après un atelier avec Philippe Djian, j’ai sorti Les Rêveurs, et le deuxième, Du côté des Indiens, sort le  août chez Grasset. Il est plus fictionnel à travers quatre personnage­s dans un immeuble de banlieue à Courbevoie. Comme les Indiens, ce sont des perdants magnifique­s, qui arrivent à se rétablir. Irène : Moi, j’ai toujours écrit par-ci par-là, et puis avec Big Bang, c’est comme si j’avais tout rassemblé, alors que d’habitude j’interprète les textes d’un autre. J’ai écrit comme une comédienne, avec le même trac, le même goût pour les personnage­s et leurs émotions.

Les Césars, c’est la cerise sur le gâteau, mais pas le gâteau”

Isabelle Carré

J’aime bien prendre les gens par l’oreille”

Irène Jacob

Et la musique dans tout ça ? Isabelle : Je ne me sens pas du tout musicienne, mais Madame Figaro avait lancé l’idée des actrices qui chantent alors j’ai fait Confidence pour confidence. Avec mon frère Benoit, c’était une chanson sur notre enfance pour l’un de ses albums, mais je ne me suis pas du tout sentie à l’aise. Irène : Moi, je suis entrée au cinéma en jouant du piano dans Au revoir les enfants. Vincent Delerm m’a proposé pour la première fois de chanter, mais c’était presque comme un murmure. Avec mon frère Francis, on a voulu revivre une aventure commune, comme quand on était enfant, et me voilà sur deux albums jazz !

 ??  ?? Isabelle Carré et Irène Jacob, dans leurs rôles de lectrices pour le Festival des mots… La première reprendra La Dégustatio­n avec Bernard Campan, en juin, au théâtre Anthéa d’Antibes, et sera au cinéma dans Délicieux, comédie dramatique avec Grégory Gadebois sur la création du premier restaurant en France. La seconde a deux projets de séries américaine­s en suspens, mais elle sera sur les planches pour Anatomie d’un suicide, « sur trois femmes de trois génération­s différente­s, qu’on suit au même instant. »
Isabelle Carré et Irène Jacob, dans leurs rôles de lectrices pour le Festival des mots… La première reprendra La Dégustatio­n avec Bernard Campan, en juin, au théâtre Anthéa d’Antibes, et sera au cinéma dans Délicieux, comédie dramatique avec Grégory Gadebois sur la création du premier restaurant en France. La seconde a deux projets de séries américaine­s en suspens, mais elle sera sur les planches pour Anatomie d’un suicide, « sur trois femmes de trois génération­s différente­s, qu’on suit au même instant. »
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