Var-Matin (Grand Toulon)

Je tiens les mêmes propos dans les médias que dans la vie”

- PROPOS RECUEILLIS PAR SYLVAIN MOUHOT

Jeudi sur France Inter, la Varoise a interprété Les Mots bleus de Christophe, en duo avec Malik Djoudi. L’émission Le Mag de l’été était captée en direct sur la pelouse de la villa Noailles.

Quelle est votre relation avec la villa Noailles ? J’ai commencé à y venir à  ans, en été, avec mes copains pour le MIDI Festival puis pour le Festival de la mode et de la photo. Je voyais cette maison trop belle, improbable, qui se transforma­it en l’endroit le plus cool du monde, deux fois dans l’année.

Vous avez déjà assisté au Festival de la mode ? Oui, en  Jean-Pierre Blanc nous a proposé d’être les égéries du festival avec Ahmad Kontar. On avait ouvert le festival par un concert. J’étais trop émue de jouer ici où je venais voir des groupes hyper “indé” et “inter” [internatio­naux, ndlr]. Quand j’étais étudiante, j’étais déjà venue voir des défilés. Je crois que c’était l’année des frites. Des créateurs belges qui avaient mis des frites dans les chaussures, partout sur leurs modèles, c’était trop bien.

Vous aimez l’extravagan­ce vestimenta­ire ? Pas particuliè­rement. J’aime les gens qui affirment qui ils sont, qui assument, qui invitent et qui proposent leurs goûts.

Quels sont vos souvenirs du lycée Jean-Aicard, que vous avez quitté en classe de re pour Nouvelle Star ? De super souvenirs. Avant ça, j’étais tous les ans avec les mêmes personnes depuis la maternelle à La Londe. En arrivant au lycée à Hyères, ça a été une explosion de saveurs. J’ai rencontré des gens très différents. Hyères a une grande culture artistique, il y a toujours eu une niche de gens assez “indés”, la majorité de ceux que je fréquentai­s au lycée est montée à Paris et est artiste.

Le lycée correspond au début de votre émancipati­on ? Bien sûr, parce que j’ai rencontré

Votre e album est en cours d’écriture avec un single, Fragile, qui marche très fort… Oui, le titre est en tête des morceaux les plus écoutés depuis six semaines. Je profite de mes vacances dans le Var pour m’isoler et terminer quelques chansons. J’ai un nouveau contrat qui fait de moi ma propre productric­e. Je suis libre de faire ce que je veux avec l’argent qui est mis à dispositio­n pour créer. J’ai des partenaire­s financiers qui font très bien leur métier, pas des gens qui m’expliquent comment faire le mien. Ce nouvel album contient une partie très pop et une partie dont je préfère réserver la surprise.

En salles, on vous retrouve depuis le  juillet dans La Nuit venue... La rencontre d’un clandestin chinois et d’une des gens qui m’ont sensibilis­ée au cinéma, m’ont fait écouter de la musique que je n’avais jamais écoutée de ma vie, lire des bouquins que je ne connaissai­s pas. Un truc s’est ouvert quand je suis arrivée, l’art s’est épaissi pour moi. Je me suis mis à faire des arts plastiques et j’adorais ça… Avec les copains, on “chillait” au Café italien quand on séchait les cours. On parlait de la vie, on débattait, c’était trop cool.

C’est là que votre vie change : Nouvelle Star, la chanson, le cinéma. Quel effet ça fait ? En général, quand tu es du sud, c’est rare de faire tes études à La Garde, Marseille ou Aix. C’est le moment où tu quittes le cocon familial, où tu prends tes premières cuites, où tu vois tes premiers mecs… Pour moi, ça a été la suite de ma constructi­on. Évidemment que ce qui m’est arrivé était extraordin­aire parce qu’inespéré. J’ai tout de suite été projetée vers ce truc de popularité où les gens attendent ta musique alors que deux jours avant, t’allais en cours call-girl, ça parle d’esclavage contempora­in. Je réalise à quel point la communauté asiatique n’est pas représenté­e dans le cinéma français. Et c’est encouragea­nt de voir qu’on fait de beaux films avec très peu d’argent.

Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait, d’Emmanuel Mouret sortira le  septembre ? C’était très dur pour moi de jouer un personnage si loin de mes valeurs, une femme qui ne choisit pas grand-chose dans sa vie, qui se laisse porter pour tout. [Sélection officielle du Festival de Cannes, ndlr].

Enfin Parents d’élèves sortira le  octobre... C’est une super comédie avec Vincent Dedienne et une équipe d’acteurs tous plus extras les uns que les autres. de français… J’étais lycéenne et la Nouvelle Star a été le diplôme qui m’a lancée dans la vie active. Ça a été un enchaîneme­nt entre l’école, les études, à comment apprendre ton métier, le faire, en apprendre d’autres, te spécialise­r, assimiler des choses qui te permettent d’être meilleur dans ce que tu fais. Tout n’a pas été facile, mais j’ai eu plus de chance que d’autres. J’ai été épargnée de cette idée de me battre pour me faire une place. Je suis passée par une case qui a fait que, tout de suite et très tôt, j’ai eu une place. C’est une chance inespérée dans une vie.

Faire de la musique, c’était un rêve de gosse ? Quand j’étais petite, je voulais être artiste ou prof de langue à l’étranger pour voyager. Je pensais faire une licence et un master pour organiser des festivités dans le cinéma, la musique, l’art. Être dans la culture, mais de l’autre côté. Je rêvais d’être chanteuse et comédienne, sauf que quand tu grandis ici, on ne t’explique pas comment devenir artiste. Au forum des métiers, on t’explique comment rentrer dans l’armée, devenir pompier, être prof... Faut vraiment avoir des parents qui te poussent, tomber sur des profs qui te donnent goût à ça, qui te disent qu’il y a une autre branche possible.

Dans la musique, est-ce difficile d’exprimer sa création sans être influencé par les autres ? Il faut être bien entouré, avoir un bon avocat, un bon contrat. Il faut du caractère, avoir confiance en soi, il faut se battre. Mais comme dans tous les métiers. C’est plus dur de s’imposer dans la musique que dans le cinéma, je pense. Les gens du métier auxquels tu t’adresses ne sont pas les mêmes.

Qu’est-ce qui vous a poussée à vous exprimer sur les violences policières ? Je n’ai pas peur d’exprimer mes opinions. Je tiens les mêmes propos dans les médias que dans la vie. Si au café j’entends un mec qui dit une horreur, je vais le reprendre. Pas pour lui dire qu’il a tort mais pour dire : “Regarde, tu peux voir les choses autrement”. Ça marche aussi. “Je ne te juge pas, je ne condamne pas. Tu as le droit de penser comme ça, mais je ne suis pas d’accord avec toi.” Dans le milieu, il y a beaucoup d’artistes qui aimeraient soutenir mes propos, pouvoir dire des choses. Mais ils se retiennent par rapport à leur public ou ils croient que leurs partenaire­s vont arrêter de les soutenir. Ils pensent que ça mettrait leur carrière en danger et je le comprends parce que c’est le cas en fait, un peu. Ça dépend de comment tu fais ce métier. Dans On n’est pas couché, j’ai parlé de beaucoup de choses, pas seulement de violences policières. C’est une émission dans laquelle on parle d’actualité, je suis obligée de m’exprimer.

Un flot de haine s’est exprimé sur les réseaux sociaux, des propos racistes ont été tenus à votre égard. Votre réaction ? Ça me donne de la force et ça montre que j’ai raison de prendre la parole.

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