« Partout où sont passés les Alliés, il reste des obus »
Le butin de Tom et Christophe à Saint-Raphaël n’étonnent pas Jérôme Guervin, directeur des hauts lieux de mémoire du Var, dont le mémorial du Débarquement et de la Libération de Provence du Mont-Faron, à Toulon, fait partie. « L’obus a été trouvé à l’ouest de la plage du Dramont, c’està-dire le lieu choisi par le commandement allié pour débarquer le 15 août 1944, rappelle cet ancien officier féru d’histoire. La 36e division d’infanterie américaine devait débarquer entre Fréjus et Anthéor (sur la commune de Saint-Raphaël), mais s’est heurtée à un champ de mines. Ils ont été obligés de passer par cette plage. L’obus est sûrement une munition non-explosée lancée en préparation du Débarquement. Il arrive aussi que ce soit des obus oubliés au moment de la distribution des munitions aux soldats qui s’enfonçaient dans les terres. »
Des combats appuyés par bombardement
Partout où les alliés, Britanniques, Américains et Français surtout, sont passés à partir du 15 août dans le cadre de l’opération « AnvilDragoo », des engins explosifs sont trouvés encore aujourd’hui. De Marseille à Nice (voir la carte ci-dessous ).« Dans les jours qui ont suivi, les troupes ne sont pas restées sur les plages. » Le Débarquement a été très rapide, « moins d’une quinzaine de jours » au total explique Jérôme Guervin. Les opérations sont bouclées le 28 août avec la prise de Nice aux forces nazies. « Les troupes américaines sont vite remontées par la Vallée du Rhône pour sécuriser la frontière est et filer vers le nord .» De quoi expliquer pourquoi les démineurs sont régulièrement appelés sur des sites montagneux dans les AlpesMaritimes, des massifs du Var et des Bouches-duRhône.
De Marseille à Nice, en passant par le Beausset
La grenade à fragmentation trouvée il y a une semaine sur une plage du quartier de la Myrte, à Toulon, n’a rien d’un hasard non plus. « Libérer Toulon et Marseille, les deux ports en eaux profondes, était un objectif majeur du Débarquement de Provence. » Une opération menée par le général Jean de Lattre de Tassigny, « avec succès puisqu’elle s’est achevée avec cinquante jours d’avance sur ce qui était prévu. »« Il y avait déjà eu de gros combats en 1939-1940, notamment face aux Italiens. Les forts placés dans le sud des Alpes n’ont jamais capitulé, il a fallu l’Occupation pour qu’ils rendent les armes. » Rebelote en 1945, dans l’Authion. Sur ce massif des Préalpes de Nice et de Menton, les combats ont fait rage jusqu’à la tout fin de la guerre. « En 1945, il y avait encore des poches où les Allemands ont résisté », confirme Jérôme Guervin.
Les combats, la météo, et les curieux
Et, a fortiori, des bombardements, laissant, depuis, dormir des obus et des munitions sous terre. Comme l’explique une source au Groupement d’intervention du déminage (GID), « les munitions non-explosées sous terre peuvent rester sous terre. Mais certaines peuvent aussi rouler, quand ça ravine lors des pluies et des tempêtes. » La météo n’est pas la seule à déplacer les vestiges de la guerre. Malgré les recommandations, chaque année, des curieux se risquent au jeu de la chasse aux obus. Sur certaines plages du département, le détecteur de métaux est interdit pour éviter ce phénomène (lire notre encadré par ailleurs ).« Ilya les collectionneurs et les passionnés de la Seconde Guerre mondiale, qui ramènent des obus chez eux. Il y a même des clubs pour ça, s’agace un gradé du GID. Des générations après, on est appelés par des gens qui ne comprennent pas pourquoi il y a des obus dans leur cave. Je peux vous assurer qu’ils ne sont pas arrivés tous seuls, et ce ne sont pas les Américains qui les ont mis là... »