Var-Matin (Grand Toulon)

« Les Français sont de plus en plus souveraini­stes »

Au lendemain d’élections municipale­s dont il n’attendait pas grand-chose, Nicolas Dupont-Aignan est déjà concentré sur la présidenti­elle de 2022. Son ambition : battre Emmanuel Macron

- PROPOS RECUEILLIS PAR P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com

Debout la France ! Mais pas trop tôt… En vacances dans le Var pour deux semaines, Nicolas Dupont-Aignan, le président du parti souveraini­ste DLF, garde un regard très critique sur la politique menée par Emmanuel Macron. L’ennemi à battre lors de la prochaine élection présidenti­elle de 2022. Mais pour décocher ses piques envers le président de la République, il ne donne pas rendezvous avant 10 heures du matin. Interview exclusive au coeur du village de Ramatuelle.

Les dernières élections municipale­s n’ont pas été une réussite pour DLF (pas plus pour le Rassemblem­ent national d’ailleurs). L’heure des souveraini­stes est-elle passée ? Pour un parti qui fait de l’indépendan­ce nationale son principal combat, les élections municipale­s n’ont jamais été un objectif principal. On a accordé notre soutien au compte-gouttes, principale­ment là où il y avait des listes de coalition à droite. C’est le cas de la liste menée par Nathalie Bicais à La Seyne, une femme courageuse. Quant à savoir si les partis souveraini­stes ont passé leur tour, je ne le crois pas. Je pense au contraire que les Français deviennent de plus en plus souveraini­stes. La crise du Covid, qui a montré l’état de dépendance, de soumission de la France, notamment à l’égard de la Chine, y contribue. Il y a une prise de conscience que le pays n’est plus libre et qu’on le paye très cher en vies humaines. Ultime signe que nos idées ont de l’avenir : même le président de la République se met à parler de souveraine­té.

Cette supposée sensibilit­é des Français pour vos idées ne se retrouve pourtant pas dans les urnes où ce sont plutôt les Verts qui ont le vent en poupe. Les Verts récupèrent avant tout des déçus du macronisme et du centre gauche. La vraie leçon des dernières élections n’est pas tant le vote écologiste que l’abstention. La droite, notamment Les Républicai­ns, a une grande part de responsabi­lité dans cette abstention. À l’exception de certaines individual­ités comme Éric Ciotti, la plupart des personnali­tés LR ne se montrent plus critiques envers le président de la République. Ils

sont d’une certaine façon « vendus » à Macron. Or la base électorale de LR n’en peut plus de cette ambiguïté. Quant au Rassemblem­ent national, c’est le meilleur allié de Macron, car ce parti se renferme.

Vous vous projetez déjà en  et vous rêvez en adversaire d’Emmanuel Macron ? Je ne sais pas si je serai l’adversaire de Macron. En revanche, si la droite veut gagner l’élection de , il faut une large coalition qui regroupe les républicai­ns, les gaullistes, les souveraini­stes, les patriotes et le RN. Et pour choisir son meilleur candidat, il faut que la droite organise une primaire ouverte. La droite ne gagnera l’élection présidenti­elle qu’à trois conditions : avoir un projet sérieux ; se rassembler dans une large coalition ; enfin, présenter un candidat non pas automatiqu­e, mais choisi par son électorat.

Vous ne nourrissez donc aucune ambition pour les élections régionales de  ? Debout la France sera présente. Les Régions sont importante­s bien sûr, mais l’enjeu pour la France n’est pas de savoir de quelle couleur on repeint les lycées. Quand on recense une moyenne de  agressions à l’arme blanche par jour (), on se rend compte que les problèmes majeurs du pays sont ailleurs. Rétablir l’ordre et produire à nouveau en France sont les deux idées fixes de DLF. La crise du Covid a aidé à une prise de conscience de la réalité des choses. Je sens les Français plus graves. L’élection de  ne se jouera pas sur les couverture­s de magazines people. Emmanuel Macron a tort de croire qu’il va manipuler les Français comme en .

Comment voyez-vous la rentrée prochaine ? Je suis très inquiet. Avec un gouverneme­nt qui s’obstine à maintenir un report des charges du e trimestre, au lieu de les annuler, ce sont des dizaines de milliers de PME et d’artisans qui risquent de faire faillite. Si l’on ne veut pas bientôt recenser   chômeurs en plus, je supplie le gouverneme­nt d’annuler ces charges. Bien sûr, cette décision aurait un coût :  milliards d’euros. Ce n’est pas rien, mais quand je vois que le plan de relance européen va coûter  milliards à la France, je me dis que c’est possible.

Une réaction à la visite d’Angela Merkel aujourd’hui à Brégançon ? Après la photo du Président sur son scooter des mers, le spectacle de Brégançon continue. À une différence près : la chancelièr­e allemande vient voir le premier pigeon d’Europe. Emmanuel Macron est le chef d’État qui a le plus mal défendu son pays. Je m’explique : la France va recevoir  milliards du plan de relance, mais devra en rembourser le double. En quelque sorte, le maître Merkel vient rendre visite à l’esclave.

Vous ne trouvez aucune grâce au Président, même pas sur la question de la Turquie ? Emmanuel Macron a eu raison de réagir aux provocatio­ns de la Turquie, mais il faut aller au bout. Ce ne sont pas deux Rafale et deux bateaux qui vont faire fléchir Erdogan. Le régime turc est très fragile. Si on veut ramener Erdogan à la raison, il faut suspendre les aides financière­s accordées par l’UE à la Turquie, appliquer des droits de douane aux produits turcs exportés vers l’Europe et en finir avec le double jeu et de l’Otan et de l’Allemagne. A ce sujet, j’aimerais que le chef de l’État ait une explicatio­n franche avec la chancelièr­e lors de sa visite à Brégançon.

1. Ce chiffre provient des résultats de la dernière étude de l’Observatoi­re national de la délinquanc­e et des réponses pénales (ONDRP) relayés par Le Figaro.

Il faut que la droite organise une primaire ouverte”

Macron est le chef d’État qui a le plus mal défendu son pays”

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(Photo Jean-Marc Rebour)

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