Var-Matin (Grand Toulon)

On pédale sur les traces des hivernants”

- AURORE HARROUIS aharrouis@nicematin.fr PHOTOS FRANZ CHAVAROCHE

Ferarri, Maserati, Lamborghin­i. L’Italie : les belles bagnoles en leur paradis ? Oui, mais pas seulement... Les transports doux ont aussi leur Eden sur la côte ligurienne. À une petite heure de route de Nice, la piste cyclable de la Riviera dei Fiori en est un exemple concluant. Un superbe trait d’union de vingtquatr­e kilomètres reliant la petite commune d’Ospedalett­i à la station balnéaire San Lorenzo al Mare. Une des plus (si ce n’est la plus) longues pistes cyclables d’Europe. Le genre de voie que l’on s’attend davantage à emprunter en Scandinavi­e que dans un pays latin qui voue un culte à l’industrie automobile presque aussi fort qu’à la cuisson parfaite des pastas. Allons voir...

Pecorino et focaccia

Même si la piste prend racine à Ospedalett­i, on zappe son premier tronçon principale­ment constitué d’un long tunnel sur les parois duquel des clins d’oeil à la classicism­a « Milan Sanremo », rappellent combien le territoire est un haut lieu de l’histoire cycliste. Notre balade débute dans la commune de Sanremo. Avant d’enfourcher son biclou ou après avoir pédalé, un tour par le centre de cette ville où l’on pousse la chanson chaque mois de mars depuis 1951 s’impose. Petit arrêt au casino et devant le cinéma Ariston sur la rue piétonne, où se produisent les vedettes. Les visiteurs les plus matinaux ramèneront du marché couvert récemment rénové, ouvert du mardi au samedi matin, cèpes séchés, conserves en tout genre. À moins de craquer pour une pointe de pecorino pepato ou une part de focaccia. On prend des forces pour grimper dans les ruelles étroites de la vieille ville où les maisons semblent empilées les unes sur les autres au sanctuaire de la Madona della Costa où le panorama s’ouvre à 180 degrés sur la ville et le bord de mer. Il est temps de le regagner. Près de la vieille gare, si l’on ne dispose pas de sa propre monture, on peut en louer à des tarifs très accessible­s sur le stand NoloBici (d’autres stands du même loueur jalonnent le parcours – bien pratique en cas de panne). Sac à dos, bouteille d’eau, maillot et andiamo ! Ici, adeptes des vélos tout carbone, jeunes à bicyclette­s de ville brinquebal­antes, rosalistes du week-end et patineurs de fond cohabitent dans une ambiance bon enfant. Il n’y a plus qu’à contracter (un peu – promis, ça ne fait pas mal !) les mollets puis se laisser bercer par le charme suranné et très dolce vita de la Riviera ligurienne, longeant les eaux turquoise. On pédale sur les traces des touristes d’antan venus par milliers au siècle dernier, attirés par le climat et le faste qui caractéris­ait alors la côte italienne. « J’ai grandi dans une ville qui était vraiment différente du reste de l’Italie, du temps où j’étais enfant : Sanremo était encore, à cette époque, peuplée de vieux Anglais, de grands-ducs russes, de personnes excentriqu­es et cosmopolit­es », disait l’écrivain Italo Calvino.

Figuiers puis tunnels

L’itinéraire longe ainsi les belles demeures, témoins debout de ces fastes anciens. Les fleurs grandissen­t partout sur cette Riviera dei Fiori. Odeurs de figuiers. Bougainvil­lier géant, bignone, figuier de barbarie, ipomée... Tout pousse à l’air libre, sans souci. Les nombreux tunnels qui ponctuent la voie offrent une fraîcheur salutaire. Bussana arrive sur le chemin. On peut crapahuter jusqu’au village d’artistes, Bussana Vecchia, à quarante minutes de vélo. Arma di Taggia affiche ses innombrabl­es serres, sous lesquelles sont cultivées oeillets, roses, iris. Santo Stefano al Mare mérite de poser le pied au sol pour découvrir ses ruelles sinueuses, chapelles votives et autres vestiges antiques. Ou simplement siroter un spritz ou savourer une glace. Le port touristiqu­e de Marina Aregai annonce ensuite l’arrivée dans la ravissante station balnéaire de San Lorenzo. Falaises, petites maisons de pêcheurs colorées et jolies plages pour piquer une tête avant le retour, souvent avec le vent de face. On pense à en garder un peu sous la terrasse. Encore ? Un peu de patience, Imperia sera reliée à la piste l’an prochain...

Si les rails ne sont plus là, le passé ferroviair­e de la piste ressurgit au fil des tunnels notamment. Ici, sifflaient les trains voyageant entre Gênes et Vintimille, de  à . À l’époque, le chemin de fer traversait des jardins potagers et des villages, empruntant la mince bande de terre entre la mer et la route nationale Aurelia. Ce qui explique que dès sa constructi­on, la ligne souffre de problèmes de circulatio­n dus à son sens unique. Au fil des ans, elle est élargie quand le tronçon le permet. Jusqu’au début du XXe siècle, les passagers des trains étaient membres de la haute société, des estivants britanniqu­es, allemands et russes qui venaient passer des vacances sur la Riviera. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la ligne a une vocation militaire. Jusqu’à devenir plus récemment obsolète. Que faire de cette bande désertée par le train qui emprunte désormais une nouvelle voie ? La société d’économie mixte au capital majoritair­ement public Area est créée afin de la transforme­r, en , en piste réservée aux cyclistes et piétons.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France