Conseils municipaux sur internet : stop ou encore ?
Un moment interdits au public à cause de contraintes sanitaires, les conseils municipaux étaient retransmis en direct sur Internet. Certains veulent continuer… d’autres s’y opposent
Faut-il continuer à diffuser sur Internet les séances de conseil municipal ? Conséquence inattendue de la crise sanitaire, cette question anime depuis peu la rentrée politique… en particulier à Toulon. Ici comme partout en France, après le confinement en effet, c’est à huis clos (ou avec un public très restreint) qu’ont eu lieu les premières séances des nouveaux mandats. Qu’ils aient été élus au premier tour ou au second, les maires n’ont pas eu d’autre choix que d’enfiler leur nouvelle écharpe tricolore dans une relative discrétion. Pour assurer cependant la « publicité des débats » comme l’impose la loi (lire cicontre), le gouvernement avait invité les communes à diffuser ces séances sur les sites municipaux ou les réseaux sociaux de la ville. Des vidéos souvent partagées ensuite par les élus euxmêmes. Durant quelques semaines, rapports sur les orientations budgétaires, installations des commissions municipales et votes des subventions aux associations ont donc joué des coudes sur les écrans avec les clips de rap, les tutos make-up ou les chatons trop mignons. Rassurez-vous, les serveurs de YouTube ou Facebook ont supporté la surchauffe. Même si les chiffres de visionnages ont de quoi faire pouffer une influenceuse mode débutante, l’enjeu de cette diffusion crispe aujourd’hui le débat. À Toulon, où la municipalité a décidé de rendre l’antenne, le sujet fait bondir les différentes forces d’opposition.
Des débats plus sereins ?
Calculant que « diffuser une séance coûte moins d’un centime par Toulonnais », Amaury Navarranne (Rassemblement national) entend « mobiliser pour faire revenir la démocratie et la transparence à Toulon [...] De qui, de quoi [Hubert Falco] a-t-il peur ? », interroge l’élu d’opposition, furieux de se voir privé de lucarne. Selon ses relevés, les conseils municipaux toulonnais ont été visionnés par 15 000 à 30 000 internautes. Du coup, il estime que la diffusion des débats est un bon moyen pour « réconcilier les Français » avec la politique. Une position que partage – pour une fois – Toulon en commun. À gauche aussi, on milite pour le retour des caméras. « C’est une façon de montrer que la politique n’appartient pas à une caste et à une génération, explique Magali Brunel. On ne peut pas se lamenter devant l’abstention et ne pas tenter de toucher les électeurs sur un média qui leur parle. » Autre avantage selon la socialiste, récemment élue à Toulon : la retransmission aurait des vertus apaisantes. « C’est manifestement un gage de sérénité des débats. Clairement, lors du dernier conseil, (le premier non retransmis depuis le début de mandat), j’ai pu observer des façons de s’adresser à l’opposition peu respectueuses qui n’avaient pas lieu lorsque c’était filmé. »
Un«show» à € par séance
Pour justifier l’arrêt des programmes, Hubert Falco avance un argument strictement opposé. Outre la facture de 1 500 euros par séance, il avoue couper les caméras pour « garantir une tenue digne des débats »et « éviter de transformer le conseil municipal en show télévisuel »… même si sa décision contrarie « ceux qui, toujours avides de lumière, profitaient de cette tribune et de cette exposition inespérée ». Il rappelle au passage qu’un « procès-verbal reprend les échanges du conseil municipal en intégralité »etqueles Toulonnais peuvent avoir accès à une retranscription qui « permet de lire calmement chaque intervention et de les analyser en dehors du feu de l’action ». Des déclarations devant lesquelles un colistier de Cécile Muschotti (qui se dit aussi favorable aux diffusions) ironise. Il a exhumé une vidéo où, avec sa casquette de président de TPM, Hubert Falco se félicitait, il y a quelques semaines, de la retransmission des séances. Brandissant son smartphone, le président assurait alors que c’est là que se trouve la « véritable démocratie citoyenne ».