Var-Matin (Grand Toulon)

Meurtre conjugal de Toulon : l’accusée « irresponsa­ble »

Les jurés ont reconnu l’abolition du discerneme­nt de Chantal Petitdemen­ge lors du meurtre de son concubin. Son avenir se situe en hôpital psychiatri­que

- V. W.

C’est une décision rare prise hier par la cour d’assises du Var, à Draguignan. Forte. En reconnaiss­ant l’abolition du discerneme­nt de Chantal Petitdemen­ge lors du meurtre de son concubin Michel Delanoy le 1er juillet 2017 à Toulon (lire nos éditions précédente­s) , les jurés l’ont déclarée irresponsa­ble pénalement. Elle devra suivre pour une durée indétermin­ée des soins psychiatri­ques dans le cadre d’une hospitalis­ation complète.

« Une justice humaine »

« C’est une justice humaine et pragmatiqu­e qui a été rendue, souffle Me Romain Dinparast dans la salle des pas perdus à l’issue du verdict. Avec ma collègue Alexandra Badea, nous nous sommes battus pour faire reconnaîtr­e par la cour que la place de Chantal n’était pas en détention mais en milieu psychiatri­que. Nous souhaition­s un résultat médical. Nous l’avons obtenu, mais ce n’est pas pour autant une négation de son acte meurtrier. » La culpabilit­é de Chantal Petitdemen­ge, accusée d’avoir poignardé en plein coeur son concubin, ne faisait en effet guère débat : elle avait avoué spontanéme­nt son geste aux policiers et les traces ADN ont confirmé ses dires. Hier matin, les plaidoirie­s et réquisitio­ns ont donc essentiell­ement porté sur sa responsabi­lité pénale et l’article 122-1 du code pénal (lire ci-contre). « Ça, c’est Chantal Petitdemen­ge ! » clamait ainsi Romain Dinparast en montrant aux jurés son (lourd) dossier médical. « Je n’ai jamais vu une femme méchante, perverse, manipulatr­ice comme ont pu la décrire certains témoins, poursuivai­t Alexandra Badea. J’ai juste vu une personne malade, et dont le discerneme­nt était, je le crois, aboli. » Aboli car ses troubles psychiatri­ques, graves et présents depuis 40 ans, étaient à l’origine du coup de couteau. Malgré les sévères réquisitio­ns de l’avocat général Jean-Jacques Gauthier (18 ans de réclusion criminelle) et la plaidoirie tout en questionne­ment de Me Catherine Missuc pour la partie civile –« est-ce que quelqu’un qui a perdu totalement son discerneme­nt est capable de nettoyer l’arme du crime, au point que les enquêteurs ne trouveront pas de traces de sang dans l’évier de la cuisine ?

D’imaginer un scénario au moment d’appeler les pompiers ? D’expliquer son geste dans une lettre rédigée trois jours plus tard ? » – la cour est allée dans le sens d’une décision de la cour d’appel qui avait reconnu en

début d’année Chantal Petitdemen­ge irresponsa­ble pour des faits, en l’espèce une gifle sur une infirmière en 2013. « Le docteur Thierry Bottai a été son meilleur avocat, ici comme là-bas, pointait Me Dinparast. Il a su faire le procès de l’état psychiatri­que de Mme Petitdemen­ge. Qui, il faut le savoir, va quand même vivre cette décision comme une condamnati­on. Car elle n’est pas libre. Il va falloir lui expliquer tout cela...»

 ?? (Croquis Rémi Kerfidrin) ?? La fine frontière entre abolition et altération du discerneme­nt aura été au coeur des plaidoirie­s des avocats.
(Croquis Rémi Kerfidrin) La fine frontière entre abolition et altération du discerneme­nt aura été au coeur des plaidoirie­s des avocats.

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